Une nouvelle traduction d’une nouvelle de Kafka, et la parution d’une superbe version illustrée du classique de Giono.
Mais d’où est donc venue à Jean-Philippe Toussaint l’idée de traduire la nouvelle de Kafka Das Urteil ? D’une invitation au Salon du livre de Chaumont, et d’une lecture, celle d’A travers les nuits de Raphaël Meltz, qui lui donne envie de replonger dans Le Verdict. Cette nouvelle occupe une place particulière dans l’œuvre de l’écrivain tchèque. Ecrite en une nuit de septembre 1912 après une longue période de page blanche, Kafka se révèle satisfait du texte. On y suit quelques heures de la vie de Georg Bendemann, un jeune commerçant qui écrit à son ami exilé en Russie. A cet ami célibataire endurci, Georg se demande s’il doit lui annoncer ou non ses fiançailles. La lettre rédigée, Georg va prendre des nouvelles de son père avec qui il vit seul, après le décès récent de sa mère. Et c’est là que tout déraille, notamment lorsque le patriarche se dresse « alors de toute sa hauteur dans le lit » (phrase qui fait basculer le récit selon Toussaint). « Tout Le Verdict est dans cette image, et tout Kafka, les grands romans, le Journal, la Lettre au père, sont déjà présents en puissance dans Le Verdict. »
La collection « Grande Blanche illustrée » chez Gallimard propose à des artistes d’illustrer des classiques de la littérature. Après Christian Lacroix et La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette, ou encore Une saison en enfer de Rimbaud par Patti Smith, c’est au tour de la plasticienne Eva Jospin de s’approprier la novella de Giono. Et autant dire que le choix fait mouche. Cette artiste dont les forêts en carton dégagent un sentiment de contemplation et de beauté s’approprie le classique de Giono paru en 1953. On y suit la rencontre du narrateur avec le berger Elzéard Bouffier, un caractère humain dont les « qualités vraiment exceptionnelles » s’observent pendant de longues années en Haute-Provence. En plantant des arbres, en donnant naissance à des forêts, par une action « dépouillée de tout égoïsme », Elzéard Bouffier rend toute sa majesté à la nature. Les dessins d’Eva Jospin entrelacent arbres et ruines, reposent et apaisent, telle une nature luxuriante qui reprend ses droits.
Le Verdict, Franz KAFKA, traduit de l’allemand par Jean-Philippe Toussaint, 48 pages, 5,50 €
L’Homme qui plantait des arbres, Jean GIONO, illustré par Eva Jospin, Gallimard, Collection Grande Blanche illustrée, 96 pages, 35 €
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