« L’ami Louis » est une biographie romancée de Louis Guilloux (1899-1980). Sylvie Le Bihan met en scène la rencontre en 1977, d’une jeune journaliste Élisabeth, avec l’écrivain Louis Guilloux. A travers le regard d’Élisabeth nous redécouvrons sa vie, son œuvre, son amitié indéfectible pour Albert Camus.
Après une enfance « vide de mémoire et vide de tendresse » Élisabeth a rompu avec ses parents. Elle ne supportait plus ni « l’air vicié » du pavillon de banlieue de son enfance, ni la mentalité étriquée de ses parents. Elle travaille à Londres pour le Booker Prize lorsque Bernard Pivot la contacte : elle doit préparer pour l’émission « Apostrophes » une grande rétrospective consacrée à Albert Camus. Ses recherches la conduisent vers Louis Guilloux. Leur rencontre sera déterminante grâce à la fougue et à la tendresse paternelle de l’écrivain, âgé alors de 78 ans.
Le.la lecteur.ice va découvrir l’enfance pauvre mais heureuse de Louis Guilloux à Saint-Brieuc, ses débuts d’écrivain, son échec au Prix Goncourt 1935 pour Le sang noir, son amitié avec Albert Camus. Une amitié décrite par Louis Guilloux comme « un coup de foudre existentiel ». Mais Élisabeth va trouver la photographie, d’une belle italienne Liliana, l’amour secret de l’écrivain. Cette découverte pourrait compromettre son amitié avec Louis Guilloux. Élisabeth poursuit alors son enquête et va affronter des révélations concernant son propre passé familial.
Le roman de Sylvie Le Bihan est de lecture facile. Il a le mérite de remettre en lumière la vie et l’œuvre de Louis Guilloux, un écrivain majeur du 20ème siècle. Il a reçu le Prix Renaudot en 1949, pour Le jeu de patience, et le Grand prix de littérature de l’Académie française en 1973.
Le.la lecteur.ice va aimer cet homme juste, profondément traumatisé par la grande guerre. Il est resté fidèle à son origine modeste, à ses convictions, à ses amis. Il est aussi un homme d’engagement tourmenté par cette question récurrente : « Qu’a t’on fait pour les pauvres et les persécutés ». Il viendra ainsi en aide, à Saint-Brieuc, en 1938-1939, aux réfugiés républicains espagnols. Il est aussi un homme fragile, foudroyé par la mort brutale en 1960 d’Albert Camus. Après ce jour funeste, « vivre ne sera plus que survivre ».
Si le lecteur s’imprègne de l’ambiance du Saint Germain des Prés de l’après guerre, Saint-Brieuc tient une place prépondérante dans le roman. La ville peut paraître sombre, rugueuse mais Louis Guilloux nous apprend à aimer la Bretagne et « sa douceur cachée sous le granit ».
Le personnage d’Élisabeth, la narratrice, est romanesque. Elle va être transformée par sa rencontre avec Louis Guilloux. Ses « leçons » lui seront bien utiles pour affronter son lourd passé familial et « ne plus entretenir le fétichisme de ses racines ».
Sylvie Le Bihan a écrit un roman aux multiples facettes mais on retiendra de ce beau portrait de Louis Guilloux, un hommage à l’amitié et à un engagement social exemplaire, quotidien, durable, au plus proche des démunis.
Sylvie Le Bihan, L’ami Louis, éditions Denoël, 432 pages, 22,5 euros, sortie le 20 08 2025.