Ancienne journaliste, Dalya Daoud signe avec ce premier roman une expérience littéraire de haute voltige.
La banlieue ? Tout le monde, pour le pire comme le meilleur, l’imagine. Pareil pour la campagne. Mais au milieu des deux ? Qu’y a-t-il ? Un no man’s land ? Pas vraiment. Quelque part entre les deux se glissent des lotissements et des habitants d’une France périphérique trop souvent invisibilisée.
C’est pourtant dans cet interstice que Dalya Daoud a choisi de situer son premier roman. Challah la danse décrit une société entre deux univers, des destins broyés par l’industrialisation et rejetés par la campagne, des familles d’immigrés ouvriers chez eux nulle part, pas plus ici que là-bas. Aussi, n’ont-ils d’autre choix que de vivre dans un entre-soi, autant protecteur qu’opprimant. À moins qu’ils ne choisissent de danser, musique kabyle à fond les ballons, condition sine qua non de l’émancipation. Car danser, au milieu des conflits de voisinage et des faits de racisme ordinaire, c’est plus que rêver. C’est agir. Montrer que l’on ne s’assoit pas sur ce qui toujours nous est refusé : travailler pour Lalla, la mère de famille, être pleinement Français pour Bessan son petit dernier, continuer d’avancer pour les ouvrières et les ouvriers laissé·es sur le carreau par la fermeture de leur usine.
N’allez pas croire que Challah la danse est un énième livre sur la banlieue. Il est bien plus que cela et sans doute parce que l’on sent le souffle de l’expérience personnelle de son autrice et la patte journalistique de celle-ci. Avec ce roman, Dalya Daoud nous livre des chroniques d’une France qui, sous les radars et loin des clichés, existe. La palette de personnages la rend vivante cette France à la géographie peu assurée et aux blessures certaines. On referme le livre vibrante en espérant qu’un jour, elle danse vraiment cette France. Challah la danse.
Dalya Daoud, Challah la danse, sortie le 19 août 2024, Paris, Seuil, coll. Le Nouvel Attila, 256 p., 19,50 euros.
Visuel : © Couverture du livre