Vous ne lirez rien de plus déprimant sur la vie de couple, la famille et le monde du travail. Et c’est peut-être pourquoi Why don’t you love me ? est génial.
Faites connaissance avec la famille la plus déprimante de l’histoire de la bande dessinée. Claire et Mark sont mariés, mais malheureux. Claire sombre dans la dépression et inévitablement dans l’alcool. Son mari cherche à tout prix à maintenir la vie de famille à flot, coincé dans un boulot de directeur informatique d’une boîte auquel il ne comprend rien. Leurs deux enfants, Charley et Sally, ne reçoivent aucun amour de leur parent. Leur fils s’écrie même « J’aimerais bien que tu me dises ce que j’ai fait pour que tu arrêtes de m’aimer. Pour que je puisse réparer mon erreur et que tu m’aimes encore ! »
Peu à peu, le lecteur note des événements étranges dans cette famille dysfonctionnelle. Mark ne parvient jamais à se souvenir du prénom de son fils, l’appelant toujours Tommy et non Charley. Les discussions au sein du couple font perpétuellement l’objet de négociations, comme si rien n’allait de soi : « Le truc, Claire, c’est qu’on avait un accord, tu te souviens ? Si je t’accompagnais chez ta maman, tu m’accompagnais chez mes parents. On s’est serré la main et tout. » Mark ne cesse de répéter qu’il ne comprend rien à la gestion de site web et qu’il est censé être coiffeur.
Il faudra attendre la moitié de Why don’t you love me ? Pour que le voile se lève peu à peu. Par un retournement de situation digne d’un des plus grands cinéastes américains (on ne vous dit pas qui), Paul B. Rainey distille une forte angoisse. Au départ, on croit tenir une BD humoristique pour finalement se retrouver avec un album pessimiste et cynique sur la vie de famille. C’est déprimant, mais diablement intelligent.
Why don’t you love me ?, Paul B. Rainey, traduit de l’anglais par Christophe Gouveia Roberto, Éditions Atrabile, 216 pages, 25 €.
Visuel : © Couverture de l’album