Un sympathique trio nous conte l’histoire française de la communauté LGBTQI+. Une BD qui montre que l’homosexualité s’est construite bien souvent contre l’hétérosexualité en s’inventant ses propres espaces, codes et références.
Sur une application de rencontre, Jules et Medhi se parlent. Les deux se plaisent et décident de faire connaissance dans le quartier parisien du Marais. Alors qu’ils aident un homme à porter ses courses, les deux jeunes se retrouvent dans un traquenard. Stanislas, Stany pour les intimes, n’est autre qu’une « folle » (« folle, c’est un manifeste, un programme politico-poétique ») qui va raconter l’histoire des cultures LGBTQI+ (lesbiennes, gay, bis, trans, queers, intersexes, etc.) à nos deux héros.
Résistances queer. Une histoire des cultures LGBTQI+ dresse un vaste panorama de la vie homosexuelle en France, principalement à partir du XIXème siècle, puisque le mot « homosexualité » apparaît en 1869 sous la plume de Karl-Maria Kertbeny. Bien sûr, l’homosexualité en tant que telle a toujours existé (cf. les travaux de Walter Pater et John Addington Symonds dans les années 1860 sur l’homosexualité en Grèce antique), mais elle se constitue en tant qu’identité à la fin du XIXème siècle. La bande-dessinée revient sur les sous-cultures et modes de vie : que veut dire « être homosexuel » ? Comment se définit-on ? Que lit-on et qu’écoute-t-on ?
Mais on apprend également énormément sur tout le parcours juridique et policier qui conduisit à la dépénalisation de l’homosexualité en 1982, sous Mitterrand, en supprimant l’âge différent du consentement pour une relation homosexuelle. De nombreuses périodes sombres sont évoquées : l’outrage public à la pudeur qui apparaît dans le Code pénal en 1810, la loi de Vichy de 1942 qui crée un « nouveau délit visant quiconque aura commis un acte impudique ou contre-nature avec un individu mineur du même sexe », la déportation des homosexuels pendant la Seconde Guerre mondiale…
Antoine Idier et Pochep manient intelligemment discours sociologiques et exemples permettant de mieux illustrer leurs arguments. On croise ainsi Marcel Proust, Monique Wittig, Didier Eribon mais aussi des mouvements comme Act Up ou le Front homosexuel d’action révolutionnaire. Une belle bande dessinée qui nous qui fait prendre conscience qu’un long chemin a été parcouru, tout en ne mettant pas de côté les combats qu’il reste à mener.
Résistances Queer. Une histoire des cultures LGBTQI+, Antoine IDIER et POCHEP, La Découverte x Delcourt, 144 pages, 22,95 €