Roman graphique aux couleurs vives et au propos politique, Les Yeux d’Alex nous invite à déplacer notre regard pour mieux appréhender nos désirs.
La jeune Alex apprend une nouvelle qui bouleverse sa vie de photographe : elle est sélectionnée, en tant que jeune talent, pour le festival d’Arles ! Bien décidée à marquer les esprits, Alex choisit de présenter des nus, et plus particulièrement des corps d’hommes puisque « le corps masculin a rarement été photographié avec sensualité ou érotisme ». Ce n’est qu’en 1942 qu’un nu masculin érotique peint par une femme pour la première fois a été exposé ! Plus qu’un projet artistique, le discours d’Alex devient alors politique. C’est elle, une femme, qui va montrer le corps d’hommes car, comme elle l’écrit à la commissaire d’exposition, « je crois qu’il est temps pour les femmes de dire tout haut leur désir, de s’émanciper des normes masculines et hétérocentrées ».
Avec l’aide de sa colocataire, de la petite amie de celle-ci et du beau Medy, Alex va bouleverser les codes. Et apprendre à s’aimer soi-même : à cause de sa peau atopique, le corps d’Alex se retrouve marqué par l’eczéma dès qu’elle s’autorise le moindre écart (alcool, fatigue, contrariété…). Cette nouvelle façon d’appréhender les corps via l’objectif de son appareil photo lui permettra peut-être de porter un regard neuf sur son physique.
Après la réussite d’albums comme La Guerre de Catherine ou La Nuit est mon royaume, Claire Fauvel fait une entrée remarquée chez Glénat avec ce roman graphique politique et intelligent. Parsemé de quelques planches explicatives en noir et blanc loin d’être lourdes (« male gaze », « charge sexuelle », « pornographie »…), l’album présente les grands concepts du féminisme, sans être didactique. Marseille et la vivacité des couleurs, ainsi que quelques dessins très érotiques, font des Yeux d’Alex un album solaire.
Les Yeux d’Alex, Claire FAUVEL, Glénat, 200 pages, 25 euros
Visuel : © Couverture de l’album