«Aimer» : les Buddenbrook de Sarah Chiche

par Yaël Hirsch
15.08.2025

Pour la rentrée de septembre, Sarah Chiche propose un roman qui passe du 20e au 21e siècle de 1984 à 2024 à travers une rencontre amoureuse réitérée 40 ans après. Un roman dense qui propose une coupe dans l’histoire et la société, quelque part entre Thomas Mann et Karine Tuil.

Deux trajectoires entre deux siècles

En 1984, lors d’un déjeuner ampoulé et bourgeois entre familles chic, Margaux 9 ans, se jette dans les eaux du Léman. Alexis qui a son âge et est déjà amoureux sonne l’alerte et le père d’Alexis sauve la petite fille. Peu après, Margaux et sa maman déménagent en France, où la jeune-fille devient artiste et lutte contre pas mal de démons pour se projeter dans une vie créative et solitaire. De son côté, Alexis mène une trajectoire parfaite : école en suisse, prépa, grande école et carrière à New-York avec épouse ambitieuse et famille bien sous tous rapports. Jusqu’au jour où, dans l’Amérique qui précède juste Donald Trump, les pratiques peu éthiques et meurtrières de son entreprise le poussent à démissionner, revenir en France, divorcer et être séparé de ses filles.

Un roman dense « post »-moderniste

À travers la double rencontre amoureuse de ses personnages, Sarah Chiche offre une coupe transversale dans la vie de la classe supérieure en Suisse, France et aux États-Unis avec des allers et retours entre les pays de cette triade résolument ancrée à l’ouest dans un monde qui est sorti de la guerre froide pour verser dans l’ère qui suit la crise des subprimes. Solide dans le portrait et les psychologies de ses personnages, elle commence dans un style très précis, une langue qui fonctionne avec une précision de scalpel. Mais bientôt l’écriture et la finesse passent au second plan et «Aimer» se transforme en roman social, à thèse. C’est dommage car l’on aurait bien aimé l’épaisseur et la foudroyance des nuances tout au long du voyage de 384 pages que l’auteure nous propose. On n’en demeure pas moins accrochés aux destinées des deux personnages. Qui ne souhaite pas encore aimer à 50 ans passés?

Sarah Chiche, Aimer, Julliard, 384 p., 22,50, Sortie le 21/08/2025.

visuel (c) couverture du livre

«Aimer» : les Buddenbrook de Sarah Chiche

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