Dans le cadre du PhotoBrussels Festival, le galeriste Victor Le Fell expose à domicile les chefs de file du surréalisme. Rencontre.
Mon lien avec l’univers des galeries est très ancien, je suis, pour le dire simplement, né dedans. Je suis fils de galeriste. Après l’école, je passais à la galerie de mon père, Jean-Marie Le Fell, rue de Tournon dans le VIe arrondissement de Paris. Je vivais, je respirais des tableaux et j’accompagnais mon père, en famille, dans les foires et les salons. Et assez naturellement, j’ai commencé à aider dans la galerie. Plus tard, c’est devenu mon travail. J’ai travaillé à New-York en agence de photo. À New-York, j’ai travaillé pour YellowKorner, puis j’ai monté une société qui faisait de la location d’œuvre d’art et du leasing. J’ai cette volonté de démocratiser l’image de la galerie. Elle doit être un espace accueillant, ouvert à toutes et à tous. Que le public s’autorise à pousser la porte. C’est un espace dans lequel on peut entrer et sortir gratuitement. Il y a trois ans, les choses ont basculé. Nous étions en pleine crise de la covid, j’étais directeur de galerie avenue Matignon, et j’ai été licencié pour raison économique. Mon ancien associé m’a proposé de monter une galerie à Bruxelles, qui est devenue depuis ma propre galerie. Finalement, mon parcours est vraiment celui d’un self-made man, comme mon père. En août dernier, j’ai investi un nouvel espace de 200 m² dans le quartier des Sablons.
Cette année, on fête le centenaire du mouvement des surréalistes. Cela me permettait de montrer ce que je préfère : la photographie argentique. Avec comme fil conducteur la découverte des œuvres et des techniques de Stephane Fedorowsky. J’ai été subjugué par les photomontages qu’il avait faits en chambre noire. J’ai trouvé cela exceptionnel. J’ai eu envie de penser une exposition autour de son œuvre. Et il se trouve que le surréalisme est au cœur de son travail. J’aime provoquer des dialogues avec des artistes contemporains vivants et des artistes décédés.
Oui, aux côtés des photos de Stephane Fedorowsky, vous trouverez les œuvres des maîtres surréalistes emblématiques tels que Marcel Mariën, Pierre Jahan, Pierre Molinier, Man Ray… Toutes les photographies présentées sont des tirages argentiques d’époque réalisés en chambre noire, dont plusieurs de la collection personnelle d’André Breton.
Justement, ce que je voulais montrer, c’est comment un photographe du XXIe siècle s’empare et maîtrise les techniques des fondateurs du mouvement. Stephane a apprivoisé comme eux la chambre noire, les photos, le montage… Cela demande une grande méthode. Aujourd’hui, il existe un pan de la photographie surréaliste qui utilise des outils numériques, mais je voulais montrer uniquement des tirages argentiques d’époque qui ont été développés en chambre noire.
Finalement, les motifs sont les mêmes à travers les années. Le corps féminin est souvent représenté. Les surréalistes utilisaient et utilisent encore le détournement d’objet pour créer des messages en soi. Le surréalisme est stable dans ses choix esthétiques !
Cela offre une très belle visibilité, puisque nous sommes inscrits au programme de cette manifestation qui rassemble une cinquantaine de galeries photos. Cela permet d’élargir le statut même de l’exposition. Par exemple, il y aura un talk avec Stephane sur le développement en chambre noire, plus précisément sur la façon de réaliser un photomontage, de faire de la rayographie , des solarisations. Au sous-sol, on va recréer la chambre noire de Stephane. Ce sera passionnant !