Rick Owens, l’été de l’amour au Palais Galliera

Dès l’entrée, la scénographie impressionne par sa clarté. La salle consacrée à Los Angeles est feutrée, presque spirituelle. Les pièces exposées y sont dominées par le noir, le blanc et ce gris caractéristique qu’il appelle dust. La laine feutrée — sa matière fétiche — y est omniprésente, notamment dans les pièces inspirées d’anciens tenues militaires  et recousus avec une attention quasi religieuse. L’univers de Rick Owens se dévoile comme mystique, voire christique : marqué par son enfance dans une école catholique, il en conserve le goût du rite et la grandeur des habits liturgiques. Il les détourne avec habileté, grandes capes blanches, robes drapées avec coiffes de none. L’underground de la West Coast, sa scène fondatrice, ressurgit aussi avec puissance. Les pièces en cuir lascives côtoient du jersey  transparent.

La période parisienne tranche. Plus transgressive, elle révèle un Owens libéré des codes. Le corps y est mis à nu, au propre comme au figuré, et les conventions — notamment patriarcales — sont volontiers bousculées. Ses silhouettes sculpturales coupent littéralement le souffle. Rick Owens n’est pas diplômé de design mais de patronage industriel : une approche technique qui l’amène à penser le vêtement comme une architecture du corps.

La dernière salle rend hommage à Michèle Lamy, son alter ego. Leur chambre de Los Angeles y est reconstituée, témoignage intime de leur complicité. L’exposition rappelle le rôle fondamental de Lamy, qui l’a lancé dans sa marque éponyme avant de lui céder la scène pour se concentrer sur d’autres territoires — notamment l’hospitality.

En point d’orgue, l’exposition déborde dans le jardin du musée. Œuvres en béton, fleurs, gigantesques capes pailletés : le tout évoque à la fois Los Angeles et l’Égypte antique, dans une mise en scène monumentale et poétique.

Dans le tourbillon de la Fashion Week, cette rétrospective est une respiration radicale. Un hommage à un designer qui n’a jamais cherché à plaire, mais à créer selon ses propres lois.