Patrick Amine « laisse parler les p’tits papiers » à la galerie parisienne RSF

Papiers dorés, papiers d’argent

La chanson mélancolique de Gainsbourg, écrite et composée en 1965 pour Régine qui ne cessait de le harceler en lui demandant quelques morceaux, démarquée des « Petits pavés » que Paul Delmet et Maurice Vaucaire avaient destinée à Fréhel, jouée sur un piano bastringue désaccordé, sortie en 45 tours avec « Il s’appelle reviens », est citée dans la pastille vidéo (on ne dit plus « clip » de nos jours) présentant l’expo une fois franchie la porte de la galerie du quartier Montorgueil.

La salle du rez-de-chaussée et une partie du sous-sol sont saturées de petits formats et même de toutes petites ou minuscules pièces qui permettent au commissaire d’offrir aux visiteurs une anthologie exhaustive en matière de goût et de bon goût esthétique. Le regard est d’emblée happé par les gravures de têtes, stylisées aux forts contrastes (du noir sur fond blanc, toutes encadrées de noir) de Lukasz Kurzatkowski et par les animaux naturalisés faisant partie du bestiaire de Pascal Bernier « Accidents de chasse ».

C’est du chagrin, papier dessin

Dans un photo-collage en accordéon, Giulio Paolini rend hommage à des galeristes et des représentants de l’Arte povera; Gaiska Torrealba a esquissé en quelques traits de sanguine des portraits ou des autoportraits dans un style pouvant rappeler celui de Rembrandt; Riccardo Gusmaroli a cousu main pour créer une planche de timbres postaux italiens abstraits; les sténopés de Bruno Privat mettent au jour d’inédites planètes; on peut apprécier à juste titre la finesse des dessins et collages blanc sur blanc de Joël Kermarrec; de Pierre Buraglio Patrick Amine a retenu des pastels figuratifs et défiguratifs à la fois.

La comédienne Anouk Grinberg épate la galerie – et nous avec – en proposant une encre à visage humain dans le style expressionniste; Dominique de Beir reste dans le domaine philatélique avec un diptyque de timbres pour aveugles enjolivé de taches d’ocre et d’émeraude; Gregory Masurovsky use de la méthode pointilliste pour donner forme à la silhouette féminine; Michel Gouery suggère d’un trait sûr et impromptu d’hallucinantes orgies; Denis Monfleur est plus explicite dans ses illustrations vouées au corps de la femme… Plusieurs autres artistes méritent le détour par la rue Française.