Le Salon d’Automne à La Grande Halle de la Villette du 18 au 21 janvier 2024

Cézanne, Picasso, l’Ecole de Paris, Dalí, Zao Wou-Ki, Maillol, Rodin, Debussy, Ravel, Apollinaire, Aragon…Tous ces grands noms de l’art du 20ème siècle n’ont pas que le talent comme point commun… Ils sont tous passés par le Salon d’Automne. Sans lui, les courants artistiques majeurs du siècle dernier comme le fauvisme, le cubisme et le surréalisme auraient existé mais la résonance de ces mouvements aurait sans doute été moindre.

120 ans après sa création, le Salon d’Automne, libre et dynamique, reste l’un des principaux ambassadeurs de la diversité des expressions artistiques, sans hiérarchie ni frontière. Après une précédente édition qui a accueilli 25 000 visiteurs, ce cru 2023 propose plus de 1400 œuvres mais aussi un riche programme créatif pluridisciplinaire avec des conférences, des lectures de poésie et des performances musicales, le tout sous le regard clair des magnifiques verrières de la Grande Halle de La Villette.

Gilles Guillaume, artiste-peintre et Président du Salon d’Automne, répond aux questions de Cult.News.

Ganouche – Le Mondrianouche – 80 x 80 cm – Feutres acrylique

Quel est le programme de cette 120ème édition qui se déroule pour la première fois en hiver et pour la deuxième année consécutive à la Grande Halle de la Villette ?

Notre prochaine édition marquera les 120 ans de notre belle association toujours aussi dynamique et forte de ces nombreux bénévoles, créée en 1903 par des artistes pour les artistes. Elle se déroulera à nouveau dans la Grande Halle de la Villette, grâce aux accords passés avec la direction de l’établissement pour pérenniser cet important événement annuel dans ce lieu et dans la durée. Pour cette édition particulièrement exceptionnelle, nous accueillerons près de 1100 artistes dont 280 étrangers provenant de 43 pays. Ces artistes talentueux exercent dans toutes les disciplines artistiques : peinture, sculpture, dessin, peinture à l’eau, gravure, photographie, art numérique, art singulier, architecture… et présentent près de 1400 œuvres.
Grâce au soutien du Ministère de la Culture qui contribue, par la subvention annuelle allouée, à l’équilibre financier de notre association, nous pouvons ainsi offrir une tribune prestigieuse aux artistes nationaux et internationaux qui participent à notre Salon annuel.

Notre association d’artistes, dont les valeurs premières sont la solidarité et la fraternité des arts et des artistes a, depuis le début de l’année 2022, apporté son soutien à des artistes ukrainiens.
Notre marraine Lady Dewi Sukarno et sa Fondation Eaerth Aid Society a accepté de nous soutenir financièrement afin de mettre à disposition un stand qui permettra d’exposer gratuitement 44 œuvres de seize artistes. En relation avec l’Académie Nationale des Arts d’Ukraine à Kiev, en la personne de son Président Monsieur Victor Sydorenko, nous recevrons au cours de notre Salon une délégation d’artistes ukrainiens venant directement de leur pays durement frappé par la guerre.

L’Ours blanc de François Pompon

Parmi les réjouissances de cette année, il y aura notamment un hommage au sculpteur François Pompon connu pour ses sculptures animalières… Pourquoi cet hommage et comment va-t-il se dérouler ?

François Pompon a exposé plus de 10 ans au Salon d’Automne entre 1922 et 1933, année de sa mort. C’est d’ailleurs grâce à cette tribune qu’il connut enfin la célébrité tant attendue.
En accord avec la responsable du Musée de Saulieu, nous allons organiser un hommage et présenter des reproductions de ses œuvres sculptées. L’ours blanc, œuvre monumentale de 2,45m x 2,60m exposée la première fois au Salon d’Automne en 1922, sera mis à l’honneur à côté d’autres sculptures comme le condor, l’ara, etc., en collaboration avec le Muséum National d’Histoire Naturelle.
Le prix Pompon sera décerné à cette occasion par le Musée de Saulieu à un artiste sculpteur animalier exposant.

Rachid Koraïchi, Tenture 37

L’invité d’honneur de cette édition 2023 est Rachid Koraïchi. Que pouvez-vous nous dire de cet artiste ?

Rachid Koraïchi est un grand artiste illustrateur, peintre, plasticien, et graveur algérien contemporain, né en 1947 à Aïn-Beïda, en Algérie.
Il est diplômé de l’École Nationale Supérieure d’Alger, de l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris, de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris et de l’Institut d’urbanisme de l’Académie de Paris.
Il vit depuis de nombreuses années entre Paris et la Médina de Tunis. Ses créations sont exposées depuis 1970 dans le monde entier. Plusieurs de ses œuvres ont fait l’objet d’acquisitions officielles par le Musée National des Beaux-arts d’Alger, par l’Institut du monde arabe, par le Musée Public National d’Art Moderne et contemporain d’Alger, par le Musée National de l’Enluminure, de la Miniature et de la Calligraphie d’Alger et par le Museum of Modern Art du British Museum.
Vous pourrez retrouver quelques-unes de ses œuvres dans l’espace centrale du Salon d’Automne.

Monique Baroni (1930 – 2016) – Marché – 146 x 114 cm

Comme chaque année le salon est pluridisciplinaire avec 10 sections artistiques représentées. Quelles sont ces sections ?

Ces sections sont la peinture, la sculpture, l’architecture, la gravure, le dessin-peinture à l’eau, la photographie, art et environnemental, mythes et singularité, art digital et livres d’artistes.

Fabien Garcin – Grande aigrette – 65 x 34 x 54 cm – bronze

Pour la peinture, il existe 9 groupes. Pouvez-vous nous les lister car cela témoigne de la grande variété des styles et des techniques représentées?

Pour la peinture, ces groupes sont Abstraction, Art naïf, Chromatics, Expression libre, Figuration, Héritage et Innovation, Imaginaires, Synthèse et Variations.

Abdelkader Meskar – Le cri – Hommage à L’Aïta – 145 x 240 cm – technique mixte sur toile

Le Salon d’Automne est une institution dans le domaine des Beaux-Arts depuis sa création en 1903. Peut-on dire que c’est un salon qui s’inscrit dès le départ en rupture avec l’académisme et qui se veut avant-gardiste ?

Le Salon d’Automne qui s’était donné à ses débuts comme mission de défendre l’art encore décrié des impressionnistes, fut le berceau du fauvisme dès 1905. C’est en 1911 que le cubisme entre réellement au Salon. Les toiles de Kupka, Léger, Gleizes, Ozenfant, Marcel Duchamp et Raymond Duchamp-Villon y sont exposées. Au salon de 1912, František Kupka présente pour la première fois au public des toiles abstraites non figuratives.
Il aura aussi vu naître tous les courants modernes du XXème siècle comme le cubisme, le surréalisme, l’abstraction, la nouvelle figuration entre autres.
C’est un groupe d’amis soudés autour de Matisse avec à leur tête l’architecte Frantz Jourdain qui a imaginé un nouveau salon créé par des artistes pour des artistes.
L’éthique du Salon d’Automne réside sur l’idée qu’il n’y aurait pas d’art majeur opposé à un art mineur. Toutes les formes d’art y sont accueillies de façon égale… La photographie, la cinématographie et la mode ont été élevées au rang d’art à part entière, à l’égal des autres médiums. Cette nouvelle vision a permis au Salon d’Automne de faire émerger d’innombrables nouveaux talents reconnus aujourd’hui par l’ensemble du monde artistique.
Nous nous devons de garder cet esprit d’avant-garde et de créativité, se défiant des standards imposés, qui caractérise notre Salon: une communauté fraternelle, famille ouverte sur le monde, apolitique, laïque et pluridisciplinaire, prête à s’investir dans de nouveaux et enthousiasmants projets pour faire rayonner depuis Paris l’Art à l’international… Accusé en 1912 d’être un repaire d’avant-gardistes étrangers, le Salon d’Automne a gardé de cette époque une aura progressiste et internationaliste.
Depuis bien longtemps, le Salon d’Automne est un le seul salon autonome qui organise des expositions à l’international.
Ces dernières années le Salon d’Automne a organisé de nombreuses expositions à l’étranger notamment : Chine, Tunisie, Israël, Russie, Brésil, Espagne, Égypte, Chypre, et bien d’autres. Par ailleurs notre longue collaboration avec l’association japonaise JIAS (Japan International Art Society) du CAEA, est toujours en vigueur depuis plusieurs décennies. L’ouverture du Salon sur le monde passe par la mise en place chaque année d’une exposition au National Art Center de Tokyo permettant à 70 artistes de notre Salon d’être invités à y exposer.
Avec l’Allemagne, le projet Amplitude a déjà donné lieu, avec succès, à deux importantes expositions à Cologne en 2022 : une quarantaine d’artistes, français, allemands et polonais y ont participé. La troisième exposition s’est tenue en Pologne en juillet 2023.
Aujourd’hui les contacts noués avec le Kazakhstan, la Corée, le Pérou, la Guinée-Conakry, la Moldavie, la Roumanie et le Brésil sont en cours de développement et nous mettons tout en œuvre pour pouvoir organiser des expositions dans ces pays.

Christian Rampnoux – Garonne 1 – 165 x 90 x 75 cm – résine

Tout au long du 20ème siècle, le Salon d’Automne a joué un rôle dans la défense des grandes expressions artistiques et de grands noms y ont participé… On a parlé de Pompon tout à l’heure… Quels courants et artistes connus ont participé à ce salon depuis sa fondation ?

Après avoir participé à l’émergence de tous les courants artistiques majeurs du XXème siècle, comme acteur et témoin, Surréalisme, Cubisme, Abstraction, Nouvelle Figuration, Art singulier etc., en accueillant les plus grands noms de la peinture moderne, de Cézanne à Picasso en passant par l’Ecole de Paris, Dalí, Zao Wou-Ki et jusqu’à Antonio Manfredi (2014) et Moebius (2015), de la sculpture, Maillol, Rodin, Camille Claudel, Bourdelle, Duchamp Villon, Pompon, Germaine Richier, Ousmane Sow (2016) entre des milliers d’autres créateurs connus ou moins connus, de la musique, de Debussy ou Ravel à Didier Lockwood, de la poésie, Apollinaire, Aragon ou plus récemment Glissant, Siméon, Bonnefoy, le Salon d’Automne est incontestablement le promoteur de tous les arts, sans distinction de hiérarchie.
La photographie, le cinéma, la mode, le design ont également été défendu comme art à part entière dès les débuts du Salon d’Automne.
Grâce aux cinq générations d’artistes, fidèles à son éthique originelle, qui se sont succédé bénévolement, au service de son comité, le Salon d’Automne continue son action généreuse en faveur de la création artistique sous toutes ses formes. Reconnue d’utilité publique depuis 1920, la société du Salon d’Automne est soutenue par le Ministère de la Culture français.

Christine Muller – Ce que le silence doit à l’arbre – 100 x 80 cm – acrylique sur toile

Preuve de cette notoriété, le Petit Palais propose jusqu’au 14 avril 2024 l’exposition « Le Paris de la modernité 1905-1925 » dans laquelle le Salon d’Automne est mentionné. En quoi tient-il une place importante à cette période dans la capitale ?

C’est dans les sous-sols du Petit Palais, en réaction avec l’académisme régnant, que quelques amis, rassemblés autour de l’architecte Frantz Jourdain, Guimard, Carrière, Desvallières, Bonnard, Rouault, Vallotton, Vuillard, Matisse, et tant d’autres, décidèrent d’organiser une exposition indépendante, dans le but de promouvoir les avant-gardes et les esprits novateurs de leur temps. Instigateur de la pluridisciplinarité et l’égalité des arts, le Salon d’Automne était né. Dès 1904, le Salon d’Automne quitte le Petit Palais pour le Grand Palais à Paris.
Il y accueille alors chaque année les toutes dernières créations présentées au Salon d’Automne, y sont montrées les œuvres du Douanier Rousseau, d’Henri Matisse, de Kees van Dongen parmi tant d’autres.
Entre 1914 et 1918 les expositions au Grand Palais sont suspendues. Le 1er novembre 1919 a lieu la réouverture du Salon d’Automne. Dès lors, le salon renoue avec sa réputation scandaleuse d’avant-guerre. Francis Picabia lance en France le mouvement dada avec Tristan Tzara.
De 1920 à 1926, le Salon d’Automne continue à faire émerger de nouveaux courants et artistes, l’édition de 1922 met en avant de grands noms de l’artisanat et du design moderne français : Pierre Chareau, Jean Lurçat, René Lalique.