Au cœur des dorures, des escaliers en pierre, du plancher qui craquelle sous chacun de vos pas et des luminaires imposants, l’Hôtel de la Marine accueille jusqu’au 5 octobre 2025 l’exposition, « La couleur parle toutes les langues », issue de la Collection Al Thani.
Dès l’ouverture de la porte coulissante de l’exposition, le mystère s’installe dans un corridor noir. Le ton est donné par le nom d’Al Thani, dont les lettres se détachent par la couleur, un jaune d’or saisissant. Vous pénétrez alors dans une première pièce éblouissante : des milliers de fleurs dorées suspendues au plafond envahissent l’espace. Transporté dans l’univers des pierres précieuses et des bijoux ornés de détails impressionnants, vous les laissez vous raconter leur histoire.
Après ce préambule enchanteur, le véritable voyage commence : « La couleur parle toutes les langues » vous invite à explorer la symbolique des couleurs à travers les époques et les cultures, décliné en six sections correspondant aux couleurs fondamentales dans les arts : noir, blanc, rouge, jaune, bleu et vert.
Souvent associé au deuil, le noir évoque aussi la nuit, peuplée d’étoiles majestueuses, comme le montre une boîte en laque ornée de paillettes d’or et d’argent (Japon, vers 1920, signée Kisai). À l’inverse, il peut incarner une facette plus inquiétante, comme en témoigne une longue branche de corail noir provenant des profondeurs abyssales des océans.
Symbole de pureté et d’humilité en Occident comme en Islam, le blanc évoque également le divin grâce à son jeu avec la lumière. Dans certaines cultures asiatiques, il est aussi la couleur du deuil. Cependant, pour Newton, le blanc est le mélange de toutes les couleurs, ce qui contrarie sa dimension spirituelle. Enfin, il donne corps à l’invisible, comme le met en valeur cette amphore en cristal de roche romaine, autrefois réputée pour ses vertus médicinales.
Le rouge, couleur des émotions fortes, se fait tour à tour tendre et puissant. L’impératrice Maria Federovna de Russie offrit un cœur rouge orné de détails précieux à sa sœur Thyra, symbole d’affection profonde. Couleur de la vitalité et des plaisirs, le rouge se retrouve aussi dans des coupes à saké japonaises, véritables hommages aux festivités.
Le jaune, maîtrisé dès la Préhistoire, incarne la sagesse et l’harmonie en Asie, tandis qu’en Chine, il est réservé à l’empereur et sa famille. Sa richesse symbolique rayonne à travers les siècles et les civilisations.
D’une grande variété, le bleu s’étend du gris au vert. Dans le Proche-Orient, le bleu se rapporte au lapis-lazuli, couleur du divin. Rare et coûteuse, cette pierre semi-précieuse était importée depuis l’Afghanistan. La turquoise se voit alors assimilée au lapis-lazuli, jusqu’à la création du premier pigment artificiel au troisième millénaire avant notre ère : le « bleu égyptien ». Le bleu devient alors un pigment central dans l’histoire de l’art.
Enraciné dans la végétation, le vert symbolise la fertilité et la vie. En Mésoamérique, le jade, utilisé pour des outils et objets rituels, devient un emblème cosmique : dans cette région, le maïs façonné en jade illustre la connexion entre l’agriculture et la création de l’humanité.
Tout au long du parcours de la visite, l’exposition montre comment les couleurs transcendent les frontières, suggèrent des émotions et créent des expériences uniques. « La couleur parle toutes les langues » est une véritable ode à la diversité culturelle, une invitation à l’émerveillement et à l’ouverture d’esprit.
Visuel : © Angélina Zarader