« Interstices : Kate Barry et le paysage » au Carré Baudouin

Genèse

Kate Barry (1967-2013) était une photographe franco-britannique reconnue pour sa sensibilité artistique et son regard unique sur le monde. Fille de Jane Birkin et du compositeur John Barry, elle a grandi dans un environnement culturel riche et stimulant. D’abord célèbre pour ses portraits de personnalités et ses collaborations dans l’univers de la mode, elle a progressivement orienté son travail vers des explorations plus personnelles. La photographie de paysages est ainsi devenue un moyen d’exprimer sa mélancolie et sa quête d’introspection. Ses œuvres, marquées par une esthétique poétique et dépouillée, captent la fragilité des espaces oubliés et la résilience des traces laissées par la vie. Depuis 2021, son fonds photographique est conservé au musée Nicéphore Niépce, où il continue d’inspirer. Les expositions posthumes consacrées à son œuvre permettent de redécouvrir son approche intime et singulière.

Esthétique mélancolique et poétique

Dans cet ancien couvent au sommet de la rue de Ménilmontant, l’exposition s’ouvre sur l’un des rares autoportraits de l’artiste. Assise, le visage dissimulé par ses cheveux, dans un hangar désert, Kate Barry ne se dévoile qu’à demi-mot. Ce premier cliché annonce le fil conducteur de l’exposition : son rapport à la nature et aux infrastructures abandonnées. La première section explore ses travaux à Dinard, où le ciel gris et la mer calme s’unissent dans une harmonie mélancolique. La suite est consacrée à ses photographies prises à Fukushima, un lieu qu’elle a visité après l’accident nucléaire. Dans ces paysages marqués par la tragédie, elle capture les vestiges de souvenirs effacés, imprégnés de silence et de fragilité.

Résistance naturelle

L’étage de l’exposition explore un thème central : la résistance écologique face à l’urbanisation. Dans une vaste salle, les visiteurs découvrent des photographies mettant en avant la résilience de la nature face à une modernité invasive. Les plantes et éléments naturels, jaillissant à travers les ruines et le béton, symbolisent une lutte silencieuse pour reprendre leur place. Ce contraste entre la géométrie froide de l’urbanisme et la vitalité improvisée de la nature crée un dialogue visuel percutant. Kate Barry saisit ici la force et la fragilité d’un monde végétal en quête de survie. Ces clichés illustrent la coexistence fragile entre le sauvage et l’artificiel, ainsi que les tensions qui en découlent.

Certainement la salle où l’on se sent le plus proche de l’artiste, Kate Barry, à travers ces clichés, réalise un autoportrait bien plus sincère que si elle y était apparue elle-même.