Nous sommes « Dans l’atelier de Guido Réni ». Jusqu’au 30 mars 2025 le musée d’Orléans propose une exposition consacrée au peintre italien Guido Réni. Elle décrit la vie de son atelier et décortique son chef-d’œuvre, David contemplant la tête de Goliath.
Et la copie s’avéra être l’original! Après la restauration du musée et du tableau, l’attribution n’était plus contestable: le David et Goliath d’Orléans est bien de la main du maître. Il s’agirait même de sa première version. Cette reconnaissance conduit à cette exposition consacrée à Guido Reni, qui ouvre le 30 Novembre 2024 après quatre ans de recherches et de préparations.
Guido Reni ( 1575 -1642) est né et mort à Bologne. Après un long séjour à Rome, il y revient définitivement en 1614, à l’apogée de sa gloire. Peintre baroque, il sera influencé par Michel Ange, Raphaël, Le Caravage. Avec ses cloisons couleur terre, la scénographie de l’exposition évoque les arcades de Bologne. Les peintures sont surtout religieuses et un peu mythologiques.
Guido Reni, « le peintre divin » était célèbre dans toute l’Italie puis dans toute l’Europe. L’exposition nous permet d’admirer son talent. Le portrait de Saint Pierre pleurant est très émouvant. Seuls le visage et la main soutenant la tête sont mis en lumière. Saint Pierre est perdu dans ses pensées. Il est triste, nostalgique, presque implorant. Guido Reni nous offre une Marie Madeleine sublime. Dans sa grotte, face à la croix, la sainte se donne entièrement à sa dévotion. L’intensité du regard en témoigne. La finesse de la carnation, la beauté des cheveux, la délicatesse du paysage en arrière plan confirment l’esthétisme, l’élégance de cette peinture. Le tableau Enlèvement d’Europe a été restauré il y a un an, révélant la douce clarté des couleurs. La sensation de mouvement rendue par le drapé est remarquable. Guido Reni excellait dans l’art des estampes. L’exposition nous en montre plusieurs. La fuite en Égypte avec ange nous révèle toute la sensibilité de l’artiste, par la tendresse de Marie, son geste protecteur enveloppant l’enfant dans son drapé, le regard un peu inquiet de Joseph.
Guido Réni a toujours fréquenté des ateliers, celui du peintre flamand Denis Calvaert dès l’enfance, puis celui des Carracci à Bologne et celui du Cavalier d’Arpin à Rome. De retour à Bologne il rejoint l’atelier Carracci dont il reste le seul maître à partir de 1619. Un atelier conséquent pouvant regrouper jusqu’à 200 élèves et collaborateurs. Une véritable entreprise devant répondre à de nombreuses commandes. Des commandes indispensables : Guido Réni était très bien rémunéré mais souvent criblé de dettes, de par son addiction au jeu.
L’exposition veut nous montrer la vie de cet atelier. Elle est bien connue grâce à Malvasia, son ami et son biographe. Le visiteur pourra lire plusieurs citations provenant de sa biographie. L’exposition cherche à mettre en valeur ce travail coopératif. Ainsi sont exposés côte à côte les dessins préparatoires de Guido Reni et le tableau de l’Annonciation de Giovanni Maria Tampurini qui a conservé du dessin la composition et les deux figures principales. Nous pouvons aussi comparer plusieurs versions d’un même tableau comme dans les « Sainte Marie Madeleine » Certains collaborateurs étaient très talentueux. Entre l’« original » et les répliques il n’y a pas d’hiérarchie de valeur qui soit fixe. Ce qui rend aussi difficile l’attribution des tableaux. Pour les différentes versions de l’Enlèvement d’Europe, le visiteur pourra observer la photographie en infra rouge qui montre la qualité du dessin sous-jacent et un relevé des contours des différentes versions. Une manière de mettre la recherche au cœur de l’exposition.
Guido Reni était vraiment très célèbre. Certaines œuvres comme son Saint Michel ont été très souvent répliquées. Le visage du Christ, du tableau « Crucifixion des Capucins » à Bologne sera iconique et deviendra une image pieuse très populaire.
Logiquement, la fin de l’exposition est dédiée au David et Goliath. Une œuvre iconique pour le musée des Beaux-arts d’Orléans mais qui l’était déjà bien avant: cette peinture sera incontournable pour les artistes du 17 et 18èmes siècles et inspirera de nombreuses versions tardives. Le musée a voulu être pédagogique, nous montrant les sources d’inspiration de Guido Reni et son unique dessin préparatoire. Un tableau et une frise chronologique résument les différentes « typologies » de l’œuvre. Le visiteur pourra les comparer, grâce aux tableaux exposés, parfois seulement par des photographies, comme pour la version du « Louvre», très proche de celle d’Orléans.
Mais admirons ce chef-d’œuvre. Guido Reni a bouleversé l’iconographie : on ne voit plus la décapitation, le fond est sombre, il n’y a pas de narration. L’épée est au sol, la figure de David « démontre plus qu’elle n’agit ». Le visiteur remarquera la beauté du bleu, la finesse du drapé et de la fourrure, la posture parfaite de David. Surtout, l’artiste nous montre un David qui ne triomphe pas mais qui reste contemplatif, interrogatif face à son destin. Guido Reni nous raconte le drame, il nous le fait ressentir intensément.
L’exposition nous invite à découvrir cette peinture ancienne, la vie d’un atelier majeur à l’époque baroque, la place de la recherche dans le travail du musée. Une exposition très riche. Pour en profiter pleinement, une visite guidée pourrait être recommandée.
Dans l’atelier de Guido Reni, Musée des Beaux Arts 1 rue Ferdinand Rabier 45000 Orléans, jusqu’au 30 Mars 2025.
Visuel(c) : Guido Reni, David contemplant la tête de Goliath, Orléans Musée des Beaux arts, photographe François Lauginie.