Le musée Eugène Delacroix propose jusqu’au 23 juin 2025 une exposition consacrée à L’art de la copie. Elle nous montre des copies des œuvres les plus célèbres de Delacroix, mais aussi ses sources d’inspirations, ses esquisses, ses études.
Nous sommes au cœur du quartier latin, tout près de l’église de Saint-Germain des Prés. Une charmante petite place, une cour, nous sommes arrivés au Musée Eugène Delacroix. C’est un petit musée avec un salon, une salle à manger, une chambre, un atelier. Fondé en 1932 par la société des amis d’Eugène Delacroix, il est devenu musée national en 1971. Le peintre y a vécu de 1857 à sa mort en 1863, alors qu’il se consacrait à la décoration de la chapelle des Anges de l’Église Saint-Sulpice. Un travail titanesque et épuisant. Peu de ses meubles ont pu être conservés, mais le visiteur ressent la présence de l’artiste dans les lieux.
Un tableau explicatif résume dès l’entrée les buts de l’exposition. Elle se veut didactique. La reproduction était fréquente au 19ᵉ siècle et l’Art de la Copie veut montrer tout le talent et la créativité des copistes. Elle remet la copie dans la perspective du processus créatif.
« Copies, copier. C’a été l’éducation de tous les grands maîtres » écrivait Eugène Delacroix dans son journal. L’art de la copie se révèle dans le salon. Le visiteur pourra comparer deux copies du célèbre tableau de Delacroix: Femmes d’Alger dans leur appartement (1833). La version de William Bouguereau est lumineuse, l’appartement est inondé de lumière. Celle d’Henri Fantin-Latour, plus moderne, annoncerait par sa « touche vibrante » l’impressionnisme. Elle est séduisante en tout cas, avec la richesse du décor, le jeu de lumière, l’intimité et la confiance de ces femmes qui partagent un moment paisible, juste à elles. L’ambiance est tout autre avec La mort de Sardanapale (1827). L’œuvre exprime le désordre, la violence, la crise sacrificielle. La copie du très jeune Hippolyte Poterlet est « enlevée », elle reste presque une esquisse. Celle plus tardive de Frédéric Villot est frappante par la vivacité des couleurs, surtout celle des rouges. Le peintre aurait bénéficié des conseils du maître ! En se retournant, le visiteur sera face à « un mur de Médées ». Il remarquera la lithographie de Médée furieuse d’Émile Lassale, par la beauté du dessin et la pureté des lignes. Une photographie d’époque rappelle l’intérêt de Delacroix pour cet art naissant.
Son cousin et ami Hippolyte-Charles Gaultron nous offre une très belle copie de l’Auto portrait de Delacroix, actuellement aux Offices à Florence. Une copie très fidèle, enrichie d’une insigne d’officier de la légion d’honneur, une lumineuse tache rouge ( le ruban) dans ce tableau plutôt sombre. Le coin d’atelier. Poêle (anonyme) nous dévoile un peu de la vie quotidienne du peintre. Anciennement attribué à Delacroix, la signature est considérée comme fausse. Un exemple qui illustre les difficultés d’attribution des œuvres.
Delacroix était le chef de file du romantisme dans la peinture française mais depuis son voyage au Maroc en 1832 il était devenu un orientaliste convaincu. Les objets, sources d’inspiration pour le peintre en témoignent. L’exposition nous montre ainsi des céramiques marocaines, un chasse-mouches d’Arabie, un petit luth turc, un poignard népalais…
Mais Delacroix s’inspirait aussi de ses prédécesseurs. Une étude est exposée d’après les Caprices de Francisco de Goya mais Rubens sera sa référence. Le visiteur pourra voir plusieurs copies des œuvres de Rubens. La fuite de Loth, tout en restant fidèle à l’original est remarquable par les drapés chatoyants, la vivacité, la richesse des couleurs. Delacroix était un grand coloriste !
L’exposition se termine dans l’atelier, une pièce plus spacieuse, au fond d’une petite cour intérieure. On y voit les palettes du peintre, ses esquisses, ses études. Un Européen en costume oriental, l’homme porte un large turban marocain, nous rappelle l’orientalisme de Delacroix. Dans l’atelier sont accrochées des œuvres moins connues du peintre, ou des tableaux plus petits provenant de collections privées. L’éducation de la vierge, ou la leçon de lecture a été peint à l’été 1842, lors d’un séjour dans le château de son amie Georges Sand. Le cadre est bucolique, la tendresse des deux femmes, l’attention portée à la lecture, le doigt de Marie qui suit le texte en font une œuvre très touchante. Et pourtant elle a été refusée au « Salon » l’année suivante !
L’exposition l’Art de la copie nous montre des aspects plus intimes, une peinture moins académique, moins officielle de Delacroix. Elle met en valeur les liens tissés entre artistes, leur émulation réciproque et le rôle majeur des copies dans la création artistique.
Visuel : Henri Fantin-Latour, Femmes d’Alger dans leur appartement d’après Delacroix, détails © : Grand Palais Rmn (musée du Louvre)/ Harry Brejat
Musée Eugène Delacroix ,6 rue de Furstemberg, Paris 6ème
L’Art de la copie, du 22 février au 23 juin 2025