Sculpture, ébénisterie, charpente, maroquinerie… Pour la 30e édition du salon international du patrimoine du Louvre, le syndicat Ateliers d’art de France mettait à l’honneur du 23 au 26 octobre l’art déco sous toutes ses formes. L’occasion de rencontrer des artisans prometteurs comme Elise Foucault, sculpteure sur pierre entre restauration et création.
Entre les stands de maroquinerie, de tapisserie, d’ébénisterie numérique ou encore de peinture sur verre, celui où est installée Elise Foucault confirme cette impression de grande diversité dans le paysage des artisans du salon international du patrimoine. Dans cet espace, la chambre des métiers d’arts des Pays-de-la-Loire a sélectionné cinq talents spécialisés dans les disciplines allant de la gainerie de coffrets à la marqueterie de paille. Tout sourire et un peu stressée par l’arrivée prochaine de Brigitte Macron et de Stéphane Bern, chargé par le ministère de la Culture de la mission « Patrimoine en péril », Elise Foucault nous accueille pour discuter de son métier.
En seulement cinq ans, l’ancienne tailleuse de pierre, formée chez les Compagnons du devoir, a réussi à se faire une place dans le domaine de la sculpture sur pierre. « Quand j’ai commencé mon apprentissage en 2000, cette formation étaient réservée aux hommes pour apprendre un métier. On avait monté un petit collectif d’ailleurs pour s’entraider. Nous nous réunissons encore régulièrement entre jeunes femmes pour faire évoluer le compagnonnage. Aujourd’hui, de plus en plus de femmes entrent dans des métiers manuels d’excellence. On se dit que c’est un peu grâce à nous », se félicite-t-elle. C’est seulement en 2004 que trois femmes ont été acceptées chez les Compagnons.
Ce statut réducteur de « première femme » à exercer tel ou tel métier, Elise Foucault n’y semble pas attachée. On sent plutôt chez cette passionnée une volonté manifeste de faire connaître son art, très imprégné par la tradition tout en cherchant la modernité. « C’est sûr que mes années en tant que tailleuse de pierre ont forgé mon attrait pour l’ancien », confirme-t-elle. Un buste en argile dans le style XVIIIe siècle, posé en bordure du stand, en témoigne.
Suite à un « accident de vie », la jeune femme est contrainte de se tourner vers une autre voie. Aspirante formatrice, elle est finalement attirée par la sculpture sur pierre, une discipline où « on se laisse plus aller, on est plus dans le ressenti » et se consacre pleinement à son atelier, nommé Elfe créations. Ce choix lui permet aussi de « rester dans la pierre », et de mêler la restauration d’ornements, de bas-reliefs propres à son premier métier, à une dimension plus subjective, imaginative de la sculpture. Elise Foucault s’est ainsi « lâchée dans le bloc de pierre » pour sa création « Le murmure des anges ». Sur ces deux visages, l’un à un regard dur et la pierre y a été griffée. L’autre, qui dit un secret au premier, paraît plus calme et sa pierre a été poncée, devenant plus douce au toucher.
Pour le salon, celle qui s’est formée en 2020 dans la création et l’ornement sur pierre présente « des pièces déjà en stock, car tout créer sur mesure prend beaucoup de temps ». Elle a aussi préparé des médaillons dans la thématique. « Je les ai créés avec la pierre de Richemont, une pierre calcaire assez tendre. J’ai convoqué les formes géométriques et les motifs qui se répètent, propres à l’art déco », explique-t-elle. Même si elle avoue ne pas bien connaître ce mouvement artistique né au XIXe siècle, elle apprécie le « côté moderne » que ces créations donnent à la pierre.

L’un des médaillons style art déco créés par Elise Foucault.
Ces rencontres entre les époques donnent aussi lieu à de petits miracles. Des paillettes dans les yeux, Elise Foucault raconte la découverte qu’elle a faite lors d’une mission de restauration de lucarne qui lui avait été commandée. « En observant un élément qui m’indiquait son existence, j’ai travaillé à partir de recherches photographiques pour retrouver l’origine d’un candélabre aujourd’hui inexistant. Le propriétaire m’a ensuite demandé de lui proposer un croquis avec une touche personnelle. C’est comme ça que j’ai proposé au client de reconstituer la lucarne, et le candélabre. Il a été ravi et a dit oui ! Quand tu apprends ce métier, c’est l’histoire qui parle », sourit-elle.
En plus de ces activités, l’artisan mène aussi des ateliers pour les particuliers, adultes et enfants. « Les gens ne viennent que pour le plaisir. Dernièrement, ce qui m’a émue, c’est qu’un papa qui avait participé avec son fils m’a confié que son ce dernier rentrait chez les Compagnons, suite à ce temps passé ensemble. C’est touchant de voir qu’on sème des graines », s’enthousiasme Elise Foucault, passeuse de savoirs.
Elise Foucault taille la pierre depuis plus de vingt ans et est devenue sculpteure en 2020. ©Luna Beaudouin-Goujon