Jusqu’au 19 janvier 2026, l’artiste plasticienne française mondialement connue Eva Jospin est invitée à la Villa Médicis dans le cadre de l’Art Club #39, sous le commissariat de Pier Paolo Pancotto, qui provoque un élégant dialogue entre l’élégance mythique des jardins et la modernité brute de cette sculptrice de renom, chantre de la sculpture contemporaine française.
Aux abords du jardin, nous sommes accueilli·e·s par Pier Paolo Pancotto, commissaire d’exposition indépendant, à qui Murielle Mayette Holtz, alors directrice de la Villa, avait passé commande de renouer avec les Art Clubs tels qu’ils existaient après-guerre. Il nous explique :
« L’idée était de mettre en contact les visiteurs et visiteuses avec l’œuvre d’art et avec les artistes. Nous avons commencé en 2016. Aujourd’hui, nous en sommes à la 9ᵉ édition ». Si vous n’êtes jamais allé à la Villa, imaginez une immense maison donnant sur un jardin à la française, dont les allées forment des labyrinthes ponctués de statues plus ou moins monumentales. Au milieu de cette beauté époustouflante, des artistes du XXᵉ et du XXIᵉ siècle ont laissé leur empreinte, comme le sein bombé de Laure Prouvost au sommet de la fontaine au premier plan du jardin. Il n’y a rien d’ostentatoire à la Villa, et la manière dont le travail d’Eva Jospin a été légèrement distillé témoigne de cette envie de dialogue doux. En tout et pour tout, seuls trois espaces sont mobilisés : la Gypsothèque, l’ancien atelier de Balthus et la « chambre des oiseaux ». Cette rareté permet de prendre le temps de déambuler dans les allées à la recherche de l’œuvre suivante. »
Contrairement à Paris, Venise ou Avignon, vous ne trouverez ici aucune sculpture monumentale d’Eva Jospin, qui hurle son désir de passer à la scénographie. Pour cet Art Club, nous accédons uniquement à des œuvres posées ou accrochées. Tout commence devant le Piccolo Balthus avec Petite Folie, un réceptacle à reliques traversé par des faisceaux dorés. L’œuvre en bronze, à multiples couches, laisse la trace d’une fossilisation fantasmée. La précision des détails est sublimée par la lumière choisie par Pier Paolo Pancotto, qui voulait quelque chose « qui ressemble à une chambre, qui soit doux ».
Nous découvrons ensuite deux vidéos, Carmontelle et Forêt, qui permettent de pénétrer la profondeur de sa construction artistique.

Nous poursuivons vers la chambre aux oiseaux, où l’on tombe d’inanition devant les immenses broderies exposées sur des tentures de soie rose, sous le regard bienveillant des paysages et des oiseaux qui ornent les plafonds. Cela rappelle qu’Eva Jospin multiplie les matériaux. Son Bosquet, suite Tromper l’œil (2024) est une broderie au fil de soie sur canevas, ourlée d’un cadre en bois avec papier et carton, ses médiums préférés. Le paysage reprend ses motifs imaginaires, envahis par ses arbres et structures architecturales aux allures mystiques.
La Gypsothèque est peut-être le lieu le plus intéressant de cette visite, car elle permet de saisir l’identité la plus profonde de la Villa : permettre aux artistes de travailler. On y trouve trois œuvres d’Eva Jospin, dont sa toute première grotte, réalisée ici même il y a dix ans lorsqu’elle était résidente. Sur les murs, parmi les moulages monumentaux mêlant têtes de dieux grecs, corps parfaits et feuilles d’acanthe, se trouvent deux forêts en aplat : une noire et une en couleur naturelle de carton. Ici, on perçoit la main de l’artiste et son attention à la finesse des tiges qui composent cette forêt dense et intense.
En quelques œuvres, Pier Paolo Pancotto a su apporter de l’intimité dans l’immensité. Il permet de saisir la diversité des pratiques de cette artiste si célèbre. Le carton, le bronze et la broderie deviennent tous des supports pour des mondes végétaux et des cachettes puissantes.
Fino al 19 gennaio 2026, l’artista francese Eva Jospin è ospite alla Villa Medici nell’ambito dell’Art Club #39, a cura di Pier Paolo Pancotto, che crea un elegante dialogo tra l’eleganza mitica dei giardini e la modernità di questa rinomata scultrice. Le sue opere trasformano il cartone in foreste monumentali, esperienze immersive che il visitatore può attraversare e contemplare. Tra la Gypsothèque, l’atelier di Balthus e la “stanza degli uccelli”, ogni spazio permette di scoprire l’intimità del lavoro dell’artista e la varietà dei suoi materiali: carta, bronzo e ricami diventano mondi vegetali e architettonici unici.
Jusqu’au 19 janvier 2026, à l’Académie de France à Rome, Villa Médici
Visuels : Grotte, 2023, Carton, 74,5 x 56 x 42 cm, Collection Pink Forest & Fondazione / Fondation Mamiko,
Copyright : © ADAGP, Paris, Photo Daniele Molajoli