« The Life of Chuck » : une étincelante célébration d’une vie ordinaire

La vie de Chuck : une histoire profondément humaine

Lorsque le roi de l’horreur envoie sa nouvelle étonnamment joyeuse au réalisateur Mike Flanagan en avril 2020, ce dernier en est « bouleversé ». Dans les notes de production, il confiera :  « J’en ai pleuré du début à la fin ». Mike Flanagan, qui avait déjà adapté deux romans de Stephen King à l’écran, Jessie (2017) et Doctor Sleep (2019) venait d’acquérir les droits de la Tour Sombre (en cours de réalisation), mais il n’a jamais oublié The Life of Chuck.

Le feu vert pour une adaptation cinématographique de The Life of Chuck est donné l’année dernière et Flanagan se lance sans tarder dans la production de ce « film profondément humain »  avec comme objectif, de présenter la réalité de la vie de Chuck « sans désespoir ni cynisme » ; et, on a envie d’ajouteravec beaucoup d’humour, . Car l’énigmatique entrée en scène de Chuck et certaines séquences apocalyptiques (la disparition de Pornhub, par exemple) sont très drôles.

Une narration à rebours d’un conte de fées dystopique et jubilatoire

L’histoire de Chuck est racontée à rebours dans la nouvelle de King et Flanagan reprend la même structure, ce qui donne au récit une urgence captivante. Le troisième chapitre qui ouvre le The Life of Chuck se déroule dans une succession de catastrophes : internet est instable, puis il disparaît, le réseau GSM aussi, les séismes détachent la Californie du continent américain, les réfugiés envahissent le Nevada et le nombre de suicides et de mariages explose.

Dans ce décor intensément anxiogène, l’image de Charles Krantz commence à apparaître  sur les affiches, sur les bancs et à la télévision. Le texte « 39 belles années ! Merci, Chuck !» accompagne la photo d’un jeune homme affable au lunettes à monture noire et à l’allure de comptable. On le surnomme « l’Oz de l’apocalypse » tant sa présence virtuelle dans un monde qui s’effondre déclenche des phénomènes étranges et annonciateurs d’une fin inéluctable.

Le spectateur rencontre Chuck en chair et en os dans le deuxième chapitre. Il est inconscient et mourant d’une tumeur au cerveau à 39 ans. Les appareils de maintien en vie ont été débranchés et sa famille lui fait ses adieux. Au travers une narration habile, Chuck déploie sa personnalité riche et lumineuse au fur et à mesure que le film avance, jusqu’à ce qu’elle éclate dans toute sa splendeur dans la séquence de danse qui incarne l’essence émotionnelle du film.

Le premier chapitre nous fait découvrir Chuck enfant. Orphelin de ses deux parents, le garçon d’une beauté attachante et pure grandit avec ses grands-parents qui lui inspirent les deux passions qui donneront sens à sa vie : la danse et les mathématiques. L’ensemble du récit sera encadré par le célèbre poème de Walt Whitman « Song of Myself » (Chant de moi-même) , notamment le vers qui articule le message du film : « Je suis vaste. Je contiens des multitudes ».

Un fabuleux casting américano-britannique

Dans The Life of Chuck, Mike Flanagan voulait célébrer ce qu’il y a entre le début et la fin d’une vie : les liens, les moments, la création, sans désespoir ni cynisme. Il a réalisé  l’objectif d’encourager les spectateurs « à poser leur mallette pour se laisser aller à la danse » à l’aide d’une narration bien construite, une belle photographie et une équipe d’acteurs charismatiques et familiers du réalisateur qu’il connaît, Jacob Tremblay (Chuck adolescent) ou Annalise Basso (Janice Halliday), depuis qu’ils sont enfants.

Tom Hiddleston (Chuck) est grandiose dans la scène emblématique qui définit son personnage ; Chiwetel Ejiofor (Marty Anderson) est un remarquable professeur de littérature, amateur du calendrier cosmique de Carl Sagan et attachant ex-mari de l’infirmière Felicia Gordon, interprétée avec compassion par Karen Gillian. Benjamin Pajak est bluffant dans le rôle de Chuck enfant ; Mia Sara (Sara Krantz) est aussi lumineuse que Marek Hamil (Albie Krantz) est grave, mais ensemble, les grands-parents de Chuck remplissent l’univers de leur petit-fils orphelin d’amour et de magie. Carl Lumbly est épatant dans le rôle d’aspirant météorologiste devenu croque mort philosophe.