« Revivre », un documentaire terrible et plein de vie par Karim Dridi

Un documentaire à vif

« Si j’étais à la place de ce papa, avec ma femme, à attendre qu’on vienne nous prévenir, qu’est-ce que je ferais ? » se demande le réalisateur Karim Dridi. Selim et Luna, deux nourrissons, luttent pour leur vie avec des organes défectueux. Dans le service de réalisation pédiatrique, entre deux machines terribles et deux rouleaux de fils qui enserrent et maintiennent les petits en vie, se glisse la caméra du réalisateur. Voir ces petits corps écrasés par le matériel médical malgré le soin du personnel médical et la force d’amour de leurs parents, c’est physiquement insupportable. Pendant 1h38, on ne sort pas de la Timone. Et l’on voit, de loin en loin, l’hélicoptère jaune qui annonce la mort d’un autre enfant, mais aussi la greffe – et donc une vie normale – possible pour les deux bébés que nous suivons. Seuls quelques plans amoureux de Marseille, de son ciel rose, de sa basilique surplombant la mer, viennent nous faire respirer dans ce film littéralement intenable où, comme les parents, le spectateur a envie de s’arrêter de vivre jusqu’à savoir si les petits le pourront.

L’espoir dans l’enfer

Néanmoins, le réalisateur le rappelle dans le dossier de presse : « 95 % des enfants qui entrent en réanimation pédiatrique ressortent vivants. En France, nous avons cette chance-là ! » Suivre pas à pas l’aventure humaine doit donner de l’espoir : il y a le courage de ces petits êtres qui ne parlent pas, l’empathie juste du personnel médical qui dit toujours la vérité et garde la barre du moral haute malgré l’injustice criante de la situation ; et surtout, il y a ces parents qui couvent d’amour leurs enfants ; qui les abreuvent de soins, de caresses ; qui leur expliquent ce qu’il va se passer ; et qui se relaient pour ne pas les quitter d’une semelle, même pour aller aux toilettes. Quand l’un part dormir un peu, c’est un arrachement. On entre avec les humains suivis par le film dans ce rythme au jour le jour. On se laisse immerger dans leur espoir raisonnable. Et l’on expérimente, au plus proche de l’impossible – la mort d’un nourrisson – la puissance de l’amour d’un papa et d’une maman.