Ce vendredi 6 septembre s’est clôturée la 82e édition du Festival international du film de Venise, rendez-vous incontournable du cinéma international. Des films audacieux aux prises de parole engagées en passant par des découvertes surprenantes, retour sur le palmarès de cette édition 2025.
La Mostra s’est ouverte le 27 août avec, pour président du jury, le réalisateur et scénariste américain Alexander Payne. Le festival mettait à l’honneur, cette année, l’actrice américaine Kim Novak (Sueurs froides d’Hitchcock), récompensée d’un Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière, ainsi que le cinéaste allemand Werner Herzog, également distingué par un Lion d’or d’honneur.
Après La Chambre d’à côté de Pedro Almodóvar l’an dernier, c’est Jim Jarmusch qui décroche le Lion d’or avec Father Mother Sister Brother. Le réalisateur vampirique de Only Lovers Left Alive, livre cette fois un triptyque d’histoires distinctes, toutes reliées par un même fil rouge : la confrontation des enfants devenus adultes à leurs parents. Des États-Unis à Dublin, en passant par Paris ; trois lieux pour trois récits autonomes de relations plus ou moins distantes. Un film minimaliste, mais plein de charme et de poésie, porté par Adam Driver, Cate Blanchett, Vicky Krieps ou encore Mayim Bialik.
Le Lion d’argent (Grand Prix du jury) revient quant à lui au long métrage de Kaouther Ben Hania, The Voice of Hind Rajab. Ce film de la réalisatrice tunisienne s’inspire de l’histoire tragique de l’assassinat de la petite Hind Rajab. Le 29 janvier 2024, une famille tente de fuir Gaza en voiture avant d’être prise pour cible par l’armée israélienne. Seules Hind Rajab et sa cousine survivent dans l’habitacle et tentent de joindre le Croissant-Rouge palestinien durant plus de trois heures. Leurs corps seront retrouvés un mois plus tard par des secouristes, qui récupèrent alors l’enregistrement de l’échange téléphonique relayé ensuite sur les réseaux sociaux.
C’est cet enregistrement que la réalisatrice place au cœur de son film, pour que cette voix ne cesse de résonner. Ce huis clos oppressant, pressenti pour le Lion d’or, obtient finalement la seconde place. Deux ans après Les Filles d’Olfa (2023), Kaouther Ben Hania renoue avec le docu-fiction pour raconter l’histoire tragique de cette fillette, l’histoire de tant d’autres.
« Le cinéma peut préserver la mémoire, le cinéma peut résister à l’amnésie. Puisse la voix de Hind Rajab être entendue », espère-t-elle après une ovation de plus de vingt minutes à Venise.
Film événement de cette 82e édition, The Voice of Hind Rajab s’inscrit dans un contexte international sanglant, alors que des centaines d’artistes ont demandé aux organisateurs de la Mostra de prendre clairement position pour condamner le génocide en cours à Gaza et le nettoyage ethnique en Palestine. Une demande à laquelle le président du jury n’a pas su répondre, admettant : « Franchement, je ne me sens pas préparé à cette question. »
Dans la compétition internationale, on retrouve également The Smashing Machine de Ben Safdie, avec Dwayne Jonhson et Emily Blunt, récompensé par le Lion d’argent de la meilleure réalisation. Below the Clouds de Gianfranco Rosi reçoit le Prix spécial du jury. Quant au Prix du meilleur scénario, il est décerné à la Française Valérie Donzelli pour À pied d’œuvre, avec Bastien Bouillon et Virginie Ledoyen
Le cinéaste grec le plus audacieux et prolifique de ces dernières années revient avec un nouveau long-métrage, Bugonia. Après Pauvres créatures (2024) et Kinds of Kindness (2025), Yórgos Lánthimos signe un nouveau délire acide avec son actrice fétiche, la géniale Emma Stone, accompagnée de Jesse Plemons. Il convie également Alicia Silverstone (Clueless) pour raconter l’histoire insolite de deux personnages loufoques qui kidnappent la PDG d’un géant pharmaceutique, persuadés qu’elle est une extraterrestre. Un film aussi absurde que grinçant, qui se présente comme une métaphore d’un monde profondément divisé.
François Ozon présentait également son adaptation ambitieuse de l’œuvre emblématique et ambiguë d’Albert Camus : L’Étranger. Un pari risqué qu’il choisit de relever avec Benjamin Voisin dans le rôle de Meursault. À l’image du roman, l’univers cinématographique d’Ozon entretient volontairement l’ambiguïté autour de la culpabilité de son personnage principal. En s’attaquant à l’énigmatique Meursault, Ozon mêle fidélité à l’œuvre et audaces narratives. Une adaptation puissante en noir et blanc, portée par Benjamin Voisin et Rebecca Marder.
Avec Le mage du Kremlin, le réalisateur français Olivier Assayas signait un film adapté du best-seller de Giuliano da Empoli, racontant la trajectoire fictive de Vadim Baranov, spin doctor du président russe Vladimir Poutine. L’homme de l’ombre est incarné par Paul Dano, aux côtés de Jude Law qui prête ses traits au président russe. Après plusieurs films intimistes (Doubles vies, 2018 ; Hors du temps, 2024), Assayas renoue ici avec le thriller politique, explorant les rouages opaques du pouvoir russe. Le film propose également un panorama historique retraçant les événements marquants des trente dernières années, depuis la fin du règne de Boris Eltsine jusqu’au renforcement du régime autoritaire de Poutine.
Visuel : © Affiche officielle de la 82 édition de la Mostra de Venise 2025.