Présenté à la Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2025, Nino, premier long métrage de Pauline Loquès, déploie sur trois jours l’errance touchante d’un jeune homme en proie au choc.
Un vendredi gris, à Paris. Alors qu’il vient récupérer des résultats d’examens médicaux afin de prolonger son arrêt de travail pour burn-out, Nino (Théodore Pellerin) apprend à l’aube de son vingt-neuvième anniversaire qu’il est atteint d’un cancer de la gorge déclenché suite à un papillomavirus. Stupéfait, le jeune homme découvre dans le même temps qu’il démarre dès lundi son traitement à coups de séances de chimiothérapie, puis de radiothérapie. Un protocole qui ne lui fera pas perdre ses cheveux, mais risque par contre d’anéantir sa fertilité, ajoute le médecin. Dès lors, Nino a trois jours pour trouver quelqu’un de confiance pour l’accompagner à ses séances, pour apporter des spermatozoïdes à congeler, mais aussi pour tenter d’annoncer la nouvelle à ses proches.
Dès les premières minutes du film, Pauline Loquès parvient délicatement à s’extirper du drame tire-larmes. Tandis que la maladie de Nino est exposée dès le début du récit, le film choisit ensuite de se concentrer sur l’abasourdissement qui gangrène immédiatement le personnage suite à cette annonce foudroyante. Confus et hébété, Nino perd ses clefs d’appartement dans la foulée et va alors errer dans les rues parisiennes. D’un dîner au plat mal décongelé avec sa mère (Jeanne Balibar) à une soirée chez son meilleur ami Sofian (William Lebghil), en passant par des rencontres impromptues avec son ex (Camille Rutherford) et une ancienne camarade de classe (Salomé Dewaels), Nino dérive souvent, et bouleverse beaucoup, lors de ce weekend qui ne ressemble à aucun autre.
Boosté par la prestation profonde, et pourtant toute en retenue, de Théodore Pellerin, reparti avec l’amplement mérité Prix Fondation Louis Roederer de la Révélation à la Semaine de la Critique en mai dernier, Nino émeut par les pérégrinations de son personnage principal, ses séquences intimistes et ses répliques plutôt bien senties. La mise en scène, offrant un contrepoint habile à son propos rude grâce à son naturalisme et sa luminosité, laisse quant à elle éclore une poignée d’instants désarmants d’humour et de tendresse : celui de la conversation entre Nino et sa mère, comme celui de la confession du jeune homme à Zoé sur l’oreiller, pour ne citer qu’eux.
Par son traitement du temps qui passe, Nino rappelle par endroit Cléo de 5 à 7 (1962) d’Agnès Varda, mais fait aussi écho bien malgré lui à Paranoid Park (2007) de Gus Van Sant lors de la séquence de douche, capturé en plans rapprochés avec le son de l’eau amplifié ponctué d’un chantonnement féminin. La bande sonore du film est à ce propos un délice. Tandis que les compositions flottantes de Flore Laurentienne appuie l’état embué de Nino, les morceaux de Fontaines D.C. ou encore You! insufflent dynamisme à l’ensemble. Patchwork de sentiments savamment dosé, Nino marque par sa douceur et sa subtilité, mais surtout par l’intensité de son comédien principal. De quoi nous rendre (très) curieux.ses quant aux prochains projets de Théodore Pellerin et Pauline Loquès.
Nino de Pauline Loquès. Avec Théodore Pellerin, William Lebghil, Salomé Dewaels… France. 01h36. Sortie le 17 Septembre 2025.
Visuel : © Blue Monday Productions