C’est un premier film émouvant et fantaisiste qui ressemble à sa réalisatrice, Laetitia Dosh. « Si vous regardez bien, vous me reconnaîtrez » lance la jeune cinéaste venue présenter son premier long métrage au Festival du film francophone à Angoulême. Elle est accompagnée de son acteur principal Kodi, un griffon croisé qui interprète Cosmos, un chien multirécidiviste.
C’est la loi suisse qui le dit ! La lecture d’un fait divers poussé à son paroxysme a inspiré ce scénario à Laetitia Dosh. Elle s’est saisie de ce prétexte pour pousser le curseur de l’aberration jusqu’à filmer l’anatomie d’une facture dans l’opinion publique.
Tourmentée par les sujets qui lui tiennent à cœur (les animaux, la planète, la place des femmes), elle a construit le personnage d’une avocate inaudible, et pourtant tellement sincère, qui ne comprend pas toujours son époque. Avril, cette avocate quarantenaire dévolue aux causes perdues, défend un chien accusé de morsures. Parvenant à prouver que l’animal doit être considéré comme un individu, le procès commence et va la bouleverser profondément en tant que femme.
Entourée de François Damiens en propriétaire marginal et de Jean-Pascal Zadi en spécialiste canin, Laetitia Dosch qui joue le rôle de l’avocate a choisi le ton de la dérision. Lorsqu’on lui parle de la difficulté d’assumer le double rôle d’actrice et de réalisatrice, elle répond que c’est « comme lancer une invitation, on doit faire la cuisine et s’attabler avec les convives ».
Le film, très divertissant, réussit à faire passer des messages plus graves en soulevant de réels sujets de société. On y aborde la question de l’opportunisme politique avec l’excellente incursion d’Anne Dorval qui joue l’avocate de la partie adverse, control freak et militante d’un parti d’extrême droite. On y voit aussi la difficulté des femmes de sortir du statut de victime auquel elles sont systématiquement assignées dès lors qu’elles se défendent. Et le pivot de ces prises de conscience est l’intégrité animale du chien, réduit à la qualité d’objet.
L’histoire ne manque pas de rebondissements à la fois émouvants et révoltants dans un montage dynamique qui nous installe dans la narration, jusqu’au verdict. Elle explore la question du droit à euthanasier un animal, et parallèlement, elle met en scène subtilement notre impuissance à traiter de la maltraitance infantile et à répondre aux violences faîtes aux femmes. Avec ce script bien construit et ses bifurcations maîtrisées, Laetitia Dosch a légitimement remporté le prix du scénario à Angoulême.
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