Festival du film francophone à Angoulême : quelque part entre résistance et résilience

Le jury est présidé par Kristin Scott-Thomas, entourée d’une diversité de talents transdisciplinaires qui traversent les mots, la musique, et le cinéma.  Le collège formé entre autres de François Busnel, Cédric Kahn, Imany, Makita Samba ; va délibérer de la sélection des 10 films en compétition.

Le cinéma nous met à l’épreuve

La passion du festival souffle sur la toile, et sa programmation a capté dans l’air du temps un parfum entre résistance et résilience cette année. Résister comme l’énergie de Marie-France Brière et Dominique Besnehard depuis leur première édition en 2008, à célébrer assidûment une francophonie ouverte sur le monde, malgré la tentation de repli qui gagne du terrain ces derniers temps. L’édition 2024 éclaire le globe dans ses exodes sentimentaux du Maghreb comme avec le percutant Rabia de Mareike Engelhardt, ou le chaleureux Barbès, little Algérie de Hassan Gerrar jusqu’au Canada avec plusieurs longs métrages quebequois dont Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles de Lyne Charlebois, en passant par la Suisse avec Le procès du chien de Laetitia Dosch. La France est bien représentée avec En tongs au pied de l’Himalaya de John Wax, et l’épopée A byciclette de Mathias Mlekuz, tous en compétition.

Hommage au cinéma éternel

Résister à l’oubli en ravivant le souvenir de ces interprètes qui ont laissé en héritage universel la beauté du geste cinématographique. La veille du festival, le FFA a rendu hommage au monstre sacré Alain Delon en projetant Notre histoire, en présence de Nathalie Baye qui partageait l’affiche. Le film de Bertrand Blier a valu en 1985 le César du meilleur acteur à la légende du cinéma français décédé le 18 août. L’actrice confiera de lui qu’il était sombre, solitaire et mystérieux. Deux autres disparitions ont émaillé le cinéma français cette année, celles de Micheline Presle et Anouk Aimée. Des films iconiques comme Le diable au corps projeté en plein air, ainsi que deux documentaires retraçant la trajectoire de ces pionnières du grand écran, permettent de nouer le fil du passé avec celui des films de demain projetés en avant-première.

L’invincible été

Pas moins de dix-sept films ont été dévoilés hors compétition. L’occasion pour le cinéma de montrer aussi qu’au-delà de la résistance, la résilience est un effort quotidien pour ne pas banaliser la cruauté manifeste. Qu’elle soit environnante aussi sinueuse que violente dans Le système Victoria de Sylvain Desclous, et Hôtel du silence de Léa Pool, ou encore Everybody loves touda de Nabil Ayouch. Qu’elle soit structurelle de notre propre existence aussi frontale que diffuse dans Une vie rêvée de Morgan Simon, La vallée des fous de Xavier Beauvois, ou encore Le choix du pianiste de Jacques Otmezguine. Parmi ces récits de sursaut, le film d’ouverture Les barbares de et avec Julie Delpy lance sur le ton de l’humour la hiérarchisation des réfugiés.

Toutes les météos sont permises au cinéma pour traverser les tumultes collectif ou intime qui nous percutent. C’est l’une des missions du 7^ème art que de nourrir l’espoir de nous améliorer dans l’épreuve. A Angoulême, plus que jamais en cette fin de saison, souvenons-nous de cette phrase de Camus « Au milieu de l’hiver, j’ai découvert en moi un invincible été ».