Dans le nouveau film de Giovanni Aloi, on suit Damien (Félix Lefebvre) qui s’engouffre dans un travail où le patron, Mallaury, n’est autre que le malfrat du coin. Entre prostitution, jeux d’argents et alcool, l’atmosphère du thriller nous embarque dans une tension palpable. Jusqu’où ira Damien dans sa complicité avec le domaine ?
Sur fond noir, l’annonce « Inspiré de faits réels » installe l’ambiance du thriller. Dès le départ, les spectareurices sont plongés dans le regard de Damien, où inquiétude, détermination et tracas se mélangent.
Étudiant en quête de repères, Damien jongle entre ses cours et un travail dans un fast-food, tenu par Mallaury, un escroc dont le jeune homme cherche a avoir les bonnes grâces.
C’est lorsqu’il fait un extra pour son patron que tout bascule : le service au restaurant se transforme en maintenance d’arme et gestion d’argent sale. Rapidement, le jeune homme se retrouve enfermé dans une situation où proxénétisme, prostitution et autres activités illicites se mélangent.
Dans cette descente aux enfers, Célia incarne une lueur à laquelle se raccrocher. Néanmoins, cette jeune fille, escorte du domaine, ne passe pas de temps avec l’étudiant sans contrepartie financière. De fait, la relation est d’ores et déjà biaisée. Seul un moment volé à l’intrigue arrête le film et rend compte de la jeunesse et de l’innocence de ces deux jeunes gens qui échangent une étreinte sincère de quelques secondes.
Par ailleurs, la prédominance de la prostitution et d’une intrigue qui va de plus en plus loin crée un sentiment glauque et de dégoût très présents par rapport à cette jeunesse. La prédominance des figures masculines entre les gestionnaires et les clients, autour de ces jeunes filles habillées de blanc, dérange tout du long.
Cette impression est personnifiée lorsque quelques clients chassent inlassablement un lapin et que la scène est mise en parallèle avec Célia. Elle aussi, proie de cet endroit et de son système, est en train d’avoir une relation sexuelle payée avec un client régulier du lieu en même temps qu’un lapin innocent est en train de se faire attraper.
À travers le regard de Damien, porté par un Félix Lefebvre saisissant, le spectateur oscille entre empathie et malaise. Omniprésent à l’écran et en voix off, l’acteur nous entraîne dans une descente psychologique où la frontière entre victime, complice et bourreau s’efface peu à peu.
Le film explore cette confusion identitaire avec une mise en scène saisissante : à mesure que l’intrigue devient oppressante, le jeu de l’acteur se nuance, reflétant la perte de repères du personnage. La caméra et l’acteur se répondent avec précision, notamment grâce à l’effet du low shutter speed – une technique qui ralentit la perception du mouvement en capturant moins d’images par seconde.
Cet effet atteint son paroxysme lors d’une scène finale vertigineuse : visions hallucinées et fragments de réalité s’entrechoquent, accentuant la spirale infernale de Damien. Une performance viscérale, qui confirme Félix Lefebvre comme l’un des talents les plus prometteurs du cinéma français.
En salle le 14 mai, Le Domaine est un thriller dont on ressort avec un goût sordide.