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Gaëlle Rodeville, déléguée générale de Music & Cinema Marseille : « Les compositeur·trices sont essentiel·les à la trame narrative d’un film »

par Yaël Hirsch
14.03.2024

Le Festival international Music & Cinema Marseille célèbre ses 25 ans. Du 1er au 6 avril, ce rendez-vous incontournable attend des invités prestigieux comme les réalisateurs Felix van Groeningen Olivier Nakache et Eric Toledano, la cheffe d’orchestre Zahia Ziouani et la compositrice Lolita Ritmanis. A la veille de cette édition, la déléguée générale nous en dit plus sur le passé et le futur de l’événement.

En vingt-cinq ans de Festival international Music & Cinema Marseille, quels grands changements avez-vous remarqués dans le monde de la musique à l’image ?

Depuis 25 ans, le Festival international Music et Cinema Marseille (MCM) s’attache à promouvoir la jeune création cinématographique et la création musicale pour l’image. Nous avons choisi cette ligne éditoriale singulière parce qu’il n’existe pas de festival de cinéma en France (ni en Europe !) qui interroge la relation de la musique à l’image. Aucun festival ne met en exergue cette relation entre compositeur·trices et réalisateur·rices dans l’intégralité de sa programmation. Pourtant, les compositeur·trices sont les troisièmes auteur·trices des œuvres cinématographiques. Ils et elles sont les créateur·trices essentiel·les à la trame narrative d’un film.

Depuis la création du MCM, nous avons développé un certain nombre de dispositifs de professionnalisation en faveur du développement de carrière des compositeurs·trices, tels que le Marché européen de la composition musicale pour l’image. Créé avec le soutien de la Sacem, il offre un lieu de mise en relation unique entre producteurs·trices et réalisateurs·trices d’un côté et compositeur·trices de l’autre qui n’existait pas avant. Nous avons été à l’initiative de ce marché, mais sans l’intérêt de la Sacem et des institutions culturelles, il n’aurait jamais pu exister. Le changement tient d’une volonté commune de mettre en lumière les compositeur·trices de musique de film et de leur donner la place qu’ils méritent : celle du troisième auteur·trice dans la création d’une œuvre cinématographique.

Au fil des ans, de nombreux duos prolifiques s’y sont rencontrés, parmi lesquels Lukas Dhont et Valentin Hadjadj, mais aussi Alexis Michalik et Romain Trouillet ou encore Vincent Cappello et Matthieu di Stefano du groupe Chinese Man qui présentent cette année Nouveau monde.

 

Depuis quand ont lieu les Accords en duo ? Quels éclairages nous apportent-ils sur un film ou une série de films par rapport par exemple aux masterclasses ?

 

Le programme Accords en duo a été créé en 2019 pour nos 20 ans. Ce programme permet de mettre en lumière des duos compositeur·trices et réalisateur·trices tout en sensibilisant le public sur la relation entre musique et image. Il permet à un public cinéphile de venir à la rencontre de ces deux artistes et de comprendre le processus de création d’une musique de film. Comme les duos ont souvent collaboré sur plusieurs films, leur partage d’expérience est toujours constructif et intéressant à comprendre. Les réunir permet de rentrer dans l’intimité de leur collaboration et de se rendre compte que tout est histoire de rencontre. La rencontre nourrit et nous construit. Les Accords en duo en sont les preuves.

Quelle est votre plus grand moment d’émotion au festival ?

Chaque édition est un grand moment en soi. Il est le résultat d’une année de travail pour toute une équipe. L’ADN du MCM est d’offrir le lieu de partage et de rencontres. Chaque rencontre entre le public et les artistes sont des grands moments. Si je devais choisir, je dirais que les grands moments du festival sont ceux où les artistes créent. Nous avons créé plusieurs projets de ciné-concerts et de concerts de musique de film et, quand vous passez dans les salles de répétitions et que vous voyez tous ces artistes qui créent, vous savez pourquoi vous faites ce métier.

Cette année, je m’attends d’ailleurs à ce que le concert La Bande originale du MCM soit un événement inoubliable. Car pour marquer notre 25e anniversaire, nous avons demandé à tous·tes nos invité·es d’honneur des dernières éditions (tels que Daniel Pemberton, Howard Shore, Nainita Desai, Ibrahim Maalouf, Gabriel Yared) de nous révéler un thème de musique de film qui les a inspiré·es. Et ce sera le compositeur Gilles Alonzo ainsi qu’un orchestre conçu pour l’occasion avec des musicien·nes issu·es du Conservatoire Pierre Barbizet de Marseille qui les mettront en musique.

Parmi les invités de cette édition anniversaire, il y a les réalisateurs Olivier Nakache et Eric Toledano. En quoi est-ce symbolique et important de leur donner une carte blanche cette année ?

Nous voulions que l’ensemble de nos invités d’honneur nous ressemble. Nous voulions être accompagnés par de belles personnes. Eric Toledano et Olivier Nakache sont des personnalités bienveillantes. Leur œuvre offre des films puissants par leur sujet et par leur accessibilité à tous les publics. Nous sommes un Festival où il est essentiel que tous les publics s’y croisent. Nous avons le plaisir cette année d’être entouré·es par des personnalités aussi humanistes que talentueuses.

Music & Cinema Marseille a mis et met en avant beaucoup de compositrices, l’égalité homme-femme est-elle une des causes que vous servez et avez servie ?

Environ 80 % de l’équipe du festival est constituée de femmes… Difficile de ne pas promouvoir les femmes !
L’égalité homme-femme est au cœur de nos préoccupations, d’autant plus que les femmes compositrices ne représentent que 6 % de la profession. Nous avons toujours eu une attention particulière aux artistes féminines, qu’elles soient réalisatrices ou compositrices. Encore aujourd’hui, les compositrices et les réalisatrices témoignent trop souvent de leurs difficultés à percer dans le monde de la musique et du cinéma. Elles ne sont pas traitées de la même manière que les hommes, même celles qui sont renommées ! Le chemin est encore long, l’égalité homme-femme n’est pas encore atteinte, mais beaucoup de belles âmes font avancer les choses.

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Visuel (c) Lise Hadrien