Festival du Film de Sarlat : « Bâtiment 5 » et « La nouvelle femme » primés

Vincent doit mourir, sous le signe du Léviathan

Dernier jour à Sarlat : Ce matin, nous avons souffert avec Karim Leklou dans Vincent doit mourir de Stephan Castang (présenté à la Semaine de la critique, Cannes 2023), un thriller fantastique où, brusquement, un homme sans histoire concentre sur lui toute la haine de ceux qui croisent son regard. Sauvage, l’envie de le tuer s’empare d’eux. La paranoïa, la distorsion de la réalité s’infléchissent lors de plusieurs virages : Vincent est d’abord rejeté à sa solitude nue, puis il apprend que les parias comme lui sont nombreux. Enfin, et c’est là que Vincent doit mourir trouve son souffle, une rencontre avec une jeune femme paumée (Vimala Pons) ajoute à sa lutte pour la survie un enjeu supplémentaire. Le film commence sous les auspices du Léviathan de Hobbes, avec la guerre de tous contre tous. Il se conclut de manière romantique, avec la chanson « Vanina » de Dave. Intéressant, mais un peu long, un peu théorique. Remarquons que Vimala Pons jouait récemment dans Petite fleur de Santiago Mitre, un thriller fantastique où son mari argentin était chaque matin pris de l’envie subite de tuer son voisin, Melvil Poupaud… Décidément…

Le palmarès : Bâtiment 5 et La nouvelle femme

Ce soir, c’est déjà le palmarès, en présence – pour la première fois au festival de Sarlat – de la ministre de la Culture, venue notamment examiner un projet de studios de cinéma dans cette si belle région.

C’est le même film que les jurys lycéen et collégien ont couronné : Bâtiment 5 de Ladj Ly. Récompense plus que méritée pour ce film impressionnant, remarquablement écrit, constamment sur la brèche. Durant cette séquence politique d’élaboration de la loi sur l’immigration, primer Bâtiment 5 représente aussi un geste citoyen important. Là, plus que dans Vincent doit mourir, la réflexion sur la violence résonne directement en nous.

Dans les couloirs du festival, les échos revenaient sans cesse sur La nouvelle femme de Léa Todorov, sur la conception de la méthode pédagogique Maria Montessori. Nous avons donc vu le film : romanesque, résolument féministe, incarné par deux superbes actrices, l’italienne Jasmine Trinca (Nos meilleures années de Marco Tullio Giordana) et la française Leïla Bekhti. Sans surprise, La nouvelle femme a remporté le Prix du Public de Sarlat. Le film a bouleversé la salle. Des enfants déficients, laissés pour compte, sont pris en considération, entourés d’amour. Le combat de Maria Montessori (Jasmine Trinca), passionara farouchement indépendante, est ici livré en tandem avec une cocotte (Leïla Bekhti), confrontée au handicap de sa fille.

Le prix d’interprétation féminine a été décerné, ex aequo, à Jasmine Trinca pour La nouvelle femme et à Florence Loiret-Caille pour La tête froide, extrêmement touchante et déroutante dans ce rôle tout en revirements et nuances.

Pour le prix d’interprétation masculine, le prix est attribué à Nahuel Perez Biscayart pour La fille de son père d’Erwan Le Duc (Perdrix en 2019).

Un beau palmarès, équilibré. Avec Bâtiment 5, Ladj Ly touche en plein cœur et nous fait réfléchir véritablement.