La réalisatrice canadienne d’origine hongroise Sophy Romvari trace un portrait de famille où couvent plusieurs blessures. Avec notamment une attention à la lumière nimbant ses images, et à la musique les accompagnant.
Deux déchirements sont à l’œuvre, au sein de Blue Heron : tout d’abord, celui d’un exil lointain, pour une famille de six membres. Puis celui causé par un frère aîné au caractère ingérable, à l’attitude menaçante. À leur épreuve, on voit d’abord sa petite sœur, que l’on retrouve plus tard adulte, face à des fantômes, essayant de comprendre.
La qualité principale de ce long-métrage personnel semble au final résider dans la couleur de ses images et leur éclairage. Parcourus d’une tension sourde, en même temps que réalistes, ceux-ci élèvent la grisaille qui enveloppe ces événements relatés au rang de poésie triste et un peu sanguine. Sans jamais en faire trop où tomber dans l’appuyé. Le rythme calme des scènes vient bien s’accorder à ces tons. Ainsi, lorsqu’on voit le frère aîné pour la première fois ramené par la police, l’univers sonore et visuel de la courte séquence, en cheville avec le point de vue choisi pour la filmer, étonne.
Certaines scènes apparaissent trop courtes, pas assez menées loin, donc un peu superficielles. De même, on aurait aimé passer davantage de temps auprès de certains protagonistes, et pas seulement le fameux frère : à des instants, on peut juger que la réalisatrice nous confie dans un autre registre ses questionnements et hésitations, mais peut-être trop longuement.
Au final, on se trouve néanmoins à d’autres moments accroché par des détails distillés ça et là : un générique de dessin animé qui se répète sourdement, ou un passage musical marquant, fouillant son motif central avec grâce. Et la délicatesse que la cinéaste met dans sa démarche de transparaître, en ces endroits.
Les Entrevues, Festival des premier, deuxième et troisième films, se tiennent à Belfort jusqu’au dimanche 23 novembre 2025, pour leur quarantième édition.
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Visuel : Blue Heron © More Than Film