Michel Khleifi livre une fable douce et poétique sur l’absurdité de la guerre et le sens de la vie, el houb. Un film présenté au Festival du Film franco-arabe de Noisy-Le-Sec.
Un peu à la manière de Jeux interdits (René Clément, 1952), Michel Khleifi filme la guerre du point de vue de deux enfants. Ici, ce sont plutôt des adolescents, à la frontière entre deux âges : Yussef, douze ans, Palestinien, vit avec sa mère et sa sœur, après la première Intifada. Son père est en prison, son frère a déserté l’armée israélienne. Lorsqu’il croise le regard farouche de la belle Aïda, jeune gitane, Yussef oublie l’horreur quotidienne. Éperdument amoureux, il bascule dans un autre espace-temps, où le merveilleux a droit de cité.
Aïda use des mêmes subterfuges pour fuir la guerre et la peur : chef d’une bande d’enfants, elle excelle à inventer des mondes imaginaires. Elle confie ainsi à Yussef le conte des trois diamants : celui qui retrouvera les trois diamants du collier de sa grand-mère, perdus en Amérique du sud, aura le droit de l’épouser plus tard. Yussef prend le conte au sérieux et réfléchit aux moyens d’embarquer sur un bateau. Plus que les paroles, les regards des deux enfants disent tout ce qui compte. La vie, l’amour, le chant des oiseaux, le bruit des vagues, Michel Khleifi filme les belles choses fragiles, menacées, comme si elles étaient soudain uniques.
La réussite du film tient dans les jeux de tonalités. La brutalité, la mort planent, tandis que les enfants tissent, en filigrane, un conte enchanté, sur les mêmes chemins de poussière. Un personnage aveugle évoque le chœur antique et la fatalité. Il guide aussi Yussef, doucement, en lui enseignant la beauté du monde et la puissance de el houb.
Conte des trois diamants, de Michel Khleifi, 1994, Palestine/Grande-Bretagne/Belgique, 1h46, avec Mohammed Nahhal, Hana’ Ne’meh, Ghassan Abu Libda, Makram Khouri, Bushra Qaraman. Projeté en présence du réalisateur dans le cadre du Festival du film franco-arabe.
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