Une nouvelle tentative intéressante au sein du cinéma argentin contemporain, scrutant un pays perdu. Pas parfait, ardu, mais plutôt intéressant.
Dans ce long-métrage, le réalisateur nouveau venu Hernan Rosselli prend appui sur du réel pur pour faire jaillir une fable sociale à la portée large. Il juxtapose images au camescope de la vie de la famille de son ancienne voisine, et séquences de fiction qui réimaginent un pan de l’existence qu’elle eut. Les fragments de réel véritable se centrent pas mal sur la mère de cette voisine : la fiction nous la montre, bookmakeuse, et à la tête d’un clan familial exerçant la même activité.
Something old something new something borrowed entend faire émerger la valeur et l’intérêt d’une vie comme symbolisant en partie le destin d’une société. Le film ne s’encombre pas d’effets avant-gardistes : il colle les blocs d’ancien et de tout nouveau, pour faire jaillir du sens. Histoire qu’un ensemble n’écrase pas l’autre, il nimbe les séquences scénarisées d’une ombre quasi permanente. Tout se passe dans la pénombre, des opérations de ce clan touchant tous les paris faits dans leur quartier au instants où ses membres essayent de vivre. Sans devenir répétitif, ce choix paraît un peu excessif parfois : on ne saisit pas toujours tous les enjeux d’une suite de séquences, dans ce cadre, d’autant plus que les personnages sont nombreux. Il faut un peu de temps pour tous les identifier. Et l’action, elle, reste très sobre : le récit se déroule lentement. Il n’en reste pas moins que cet effet apparaît nécessaire pour que les passages de fiction ne prennent pas le pas sur le réel brut présenté.
Ces scènes au camescope, elles, sont agrémentées d’une voix-off qui raconte l’histoire de sa mère. Elles se révèlent souvent un peu touchantes : une tristesse bien palpable émane de tous ces matériaux qui nous sont présentés. A tel point qu’au final, on reçoit plutôt bien ce qui se joue à la toute fin du film, à savoir l’évolution des sentiments entre la mère tenant le clan et sa fille. On se rend compte, alors, qu’on s’est attaché aux destins de ces délinquants de la débrouille, fermes mais assez ordinaires au final. Sans que notre attention ait accompagné chaque séquence, on a été touché par le souffle profond du film. Il mérite donc qu’on le remercie un peu.
Visuel : © 36 Caballos