Cannes, Compétition : « Le Retour », de Catherine Corsini, se fracasse sur les clichés

Le film commence sur le visage de la formidable Aïssatou Diallo Sagna, qu’on avait découverte en compétition également dans le précédent film de Catherine Corsini : La Fracture. Elle incarne Kheididja, une mère qui fuit la Corse avec ses deux toutes petites filles. Quinze ans plus tard, elle les emmène sur l’Île de Beauté. Elle vient rejoindre la famille pour laquelle elle est nounou, un couple de bobos débordés par leurs enfants, incarnés par Denis Podalydès et Virginie Ledoyen. Et cela permet à la trépidante cadette Farah (nous sommes heureux de retrouver Esther Gohourou révélée par Mignonnes) de se prélasser sur la plage et à l’aînée Jessica (Suzy Bemba), tout juste admise à Sciences-Po, de rencontrer la jeune fille de la maison, Gaïa (Lomane de Dietrich), et de tomber amoureuse…

Un scénario de carte postale

Dans ce film où elle dit renouer avec ses origines, Catherine Corsini démultiplie les clichés avec un rythme affolant. Le scénario lui-même est structuré de telle manière que chacun en prend pour son grade : les « riches blancs », les Corses et les « jeunes », tandis que les incohérences sont formulées dans des dialogues très peu naturels, plus comme une excuse que comme un retour du refoulé.

Un film plombé par ses clichés

La Corse que nous présente Le Retour est une « carte postale ». Une sorte de Disneyland qu’on traverse en quelques minutes de voiture, avec des chèvres qui se promènent dans les villages, des insulaires aux accents traînants qui seraient tous racistes. Un monde à part, avec des hommes terriblement sexys et des mamans de mauvaise humeur et rondes. La Corse est une terre de sensualité à la Harlequin. Avec une population fermée, qui a une forte tendance à la xénophobie – cette maladie des îles – mais sans réel mauvais fond.

Les jeunes, eux, sont soit des nerds, soit des cancres, soit des snobs, soit des dealers, soit des drogués. En général, d’ailleurs ils ont perdu au moins un parent, ce qui devrait les rendre plus intéressants…

Quant aux questions touchant au milieu social et à la discrimination liée à la couleur de peau, elles sont supposées être au centre du film, mais tellement mitraillées de clichés que les bons sentiments finissent par créer un malaise. Reste le joli choix des acteurs qui s’en sortent le mieux possible avec des dialogues et des situations trop artificielles.

Au-delà de la polémique, donc, qui mettait en cause la direction assez brutale de ses équipes par Catherine Corsini et dénonçait certaines règles non respectées en ce qui concerne la direction des actrices mineures, le film déçoit beaucoup ceux et celles qui ont été émus par La Belle Saison et Un amour impossible et qui ont su rire de La Fracture.