Après Leur Algérie (2020) Lina Soualem revient avec un second long métrage documentaire émouvant et intime, dans lequel elle retrace avec l’aide de sa mère, l’actrice Hiam Abbass, l’histoire de leur famille palestinienne.
Ils sont toujours aussi rares les documentaires en salles, et pourtant, Bye bye Tibériade le prouve encore une fois, c’est uniforme aussi capable de liberté et d’universalité. En retraçant l’histoire de sa famille maternelle, l’actrice et réalisatrice Lina Soualem mêle grande histoire et petite histoire : en 1948, son arrière-grand-mère est obligée de quitter son petit village de Palestine suite aux conflits avec Israël. Mais les combats continuent, et c’est sa grand-mère qui se verra aussi obligée de fuir et tout recommencer à zéro. Sa mère est née de ce départ. De cette urgence de fuir. De ce départ, synonyme de malédiction autant que de bénédiction D’imaginer sa vie ailleurs -loin des traditions, loin du mariage. Et la réalisatrice en a hérité.
Par ce geste cinématographique, Lina Soualem interroge la circularité de son histoire familiale : il y a ce cercle que sa mère a brisé en quittant la Palestine, en devenant actrice. Et puis il y a elle, l’artiste et la famille, qui essaie à la fois de renouer avec sa mère et ses origines.
Bye bye Tibériade tire sa force de son montage et des archives. Si quelques moments paraissent artificiels, la plupart sonnent juste et touchent en plein cœur : le souvenir se transmet dans les archives filmées par le père de la réalisatrice, ou par la langue rendue vivante dans les poèmes de sa mère.
La langue justement, qui vient briser un silence : ce que Lina Soualem fait avant tout dans ce long métrage, c’est recoller des images et des mots, rassembler les pièces d’un même puzzle pour donner un sens à son histoire. Mais loin d’être auto-centré, le film touche bien à l’universel : comment se construire sur des ruines ? Comment se réinventer en permanence, dans la solitude et le silence à laquelle nous confinent les départs ?
En retournant dans son pays, en mettant en place ce geste cinématographique et personnel, ouvre le champ des possibles et permet à sa mère-et à elle-même-, de retisser un lien, qui lui n’a rien de factice ou fabriqué pour le cinéma.