À l’issue de l’édition 2023 du Festival du Film européen d’Arras, l’Atlas d’or est gagné par Holly, le nouveau film de la belge Fien Troch, qui n’était pas le plus beau portrait de femme concourant.
En gagnant l’Atlas d’or en cette année 2023, Holly fait valoir sa qualité centrale : le mystère qui irrigue son scénario. Sa jeune héroïne lycéenne a en effet le pouvoir, il faut croire, de chasser la tristesse chez les gens. Bien que tout cela ne soit peut-être qu’illusion. Il est vrai qu’en entretenant plutôt bien cette ambiguïté, ce long-métrage parvient à être un drame social qui convainc, avec une petite part de fantastique.
On peut trouver cependant que ce point fort du film est aussi sa limite. Pour rester ambigu, il a recours à un scénario qui piétine un peu trop souvent. De ce fait, le film paraît manquer de tenue et ne passionne pas tout le temps. On se réjouit donc qu’Hesitation wound ait gagné l’Atlas d’argent : lui offre un portrait de femme d’exception, mêlé de drame social en Turquie et de film de procès. C’est que tous les outils intégrés dans son scénario sont agencés de manière à faire accéder aux sentiments profonds de cette protagoniste principale. Un long-métrage joué par Tülin Özen, dirigé par Selman Nacar et produit notamment par Arizona Films, qu’on espère vivement voir sortir en France.
De même, on dit bravo au Jury Lycéen de cette année d’avoir remis le Prix Regards Jeunes à Slow. Ce passionnant essai de Lituanie donne aussi à rencontrer une magnifique héroïne féminine, qui rencontre un homme qui lui plaît beaucoup et lui déclare être asexuel, tout en lui avouant qu’elle a aussi quelque chose qui lui plaît en retour. Avec sa forme où l’image granuleuse paraît laisser toute la place pour que soit scrutée l’âme des personnages – en même temps que celle des interprètes – ce film atteint à l’étude de moeurs. Dirigé par Marija Kavtaradze, il est sublimement interprété, côté héroïne, par Greta Grineviciute.
Au final, c’est aussi un portrait de femme – contre un pays cette fois – qui gagne le Prix du public : Without air, signé entre Roumanie et Hongrie par Katalin Moldovai. Qui suit une professeure mise en cause après avoir convoqué Arthur Rimbaud et Paul Verlaine devant ses élèves. Tandis que le Prix de la Critique va à Libertate, nouveau film du roumain Tudor Giurgiu, qui immerge bien, de par sa mise en scène maîtrisée, dans la lutte des factions de défense les unes contre les autres pendant la Révolution roumaine de 1989.
Enfin, à l’issue des Arras Days, deux projets de films en développement ont pu gagner des bourses. A commencer par « Real faces » de la réalisatrice Leni Huyghe, qui entend peindre une amitié homme-femme précieuse dans Bruxelles. Mais aussi l’un des prochains projets de Stephan Komandarev. Si on s’attriste que le nouveau film du réalisateur bulgare, Blaga’s Lessons, en tout point remarquable, n’ait pas gagné de prix, on est heureux que sa prochaine réalisation se soit vue distinguée au terme des Arras Days. D’autant plus que son titre, « Made in EU », promet des questionnements bien dans la ligne directrice de ce à quoi s’attelle, chaque année, le Festival du Film européen d’Arras.
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Visuel : (c) CinéArt