En direct du festival Le temps d’aimer la danse, à Biarritz, Rémi Rivière partage ses coups de cœur.
Robinson Cassarino est un homme heureux un jour de ciel bleu à Biarritz. Songez que le danseur et tout jeune chorégraphe, présentera ce soir son unique création, Petites choses, comme il y a deux ans dans ce même festival et comme il y a trois ans. Plus qu’un hommage rigolo à Larry Tesler, le père du copié-collé, le jeune danseur ne fait que revoir sa copie et la soumettre au même public Biarrot exigeant. Un privilège qui doit d’abord au Tremplin du festival, créé au sortir du Covid. Et puis aussi, parce que ces Petites choses-là « n’ont plus rien à voir » avec les deux précédentes, assure t-il en souriant.
« La pièce évolue tout le temps » confie Robinson Cassarino. Au gré de ses inspirations, de l’air qu’il respire durant ses longues tournées d’interprète et des répètes qu’il peut arracher à son emploi du temps ou à ses deux danseurs, toujours les mêmes ceux-là, Benoît Couchot et Helena Olmedo, danseurs de haut vol du collectif Kor’sia. Le titre, la scénographie et le duo, restent immuables. Tout le reste est balayé, jusqu’à la musique.
Robinson Cassarino est danseur au sein de la Compagnie Hofesh Shechter, tourne donc dans le monde entier au rythme de 100 à 150 dates par an, il ne sait plus bien. Mais il a en revanche calculé avec minutie qu’il était danseur à 80% et chorégraphe à seulement 20%. Avec son peu de temps libre, il aimerait pourtant varier ces proportions, être davantage chorégraphe, sans même attendre la retraite du danseur. « Etre jeune permet l’erreur » pense-t-il du haut de ses 27 ans, pas vraiment rassuré. Il faut dire à sa décharge que la création est un long processus et qu’il n’est pas facile d’échapper à l’emprise de Hofesh Shechter, qui influence largement la danse contemporaine actuelle. Robinson vient du Hip Hop et du contemporain, reconnaît s’inspirer de son mentor, notamment dans le jeu des lumières et la méthode de travail, mais veut proclamer sa propre histoire. « C’est comme une crise d’ado, il faut casser l’image du père » tranche t-il. Ce qui amène bien sûr la question existentielle : « est ce que j’ai quelque chose à dire ? ». La réponse d’Argia Doyhamboure Hourcade est oui. La coordinatrice du Plaza Berri, lieu des émergences, couve ce jeune danseur et toute la pépinière de chorégraphes qui a pris ses aises au sein du festival depuis 2021. Il y a d’abord le « Tremplin Corps et Graphique » qui s’y tenait hier soir. Un concours qui s’adresse aux débutants et constitue leur premier crash test, face à un public votant et emballé. Le principe est aussi contraignant qu’un podium de couturier puisqu’il impose une scène de 13,50 m sur 2 m, sollicitant un potentiel chorégraphique tout en longueur. Les prix d’interprétation, prix du jury et prix du public espèrent susciter des vocations. Ce soir en revanche, au même endroit, une véritable scène accueillera de fragiles spectacles, au cours d’une soirée intitulée « Découverte de talents émergents ». Les lauréats du tremplin de l’an passé, Luce Bron et Tamara Fernando, se produiront demain soir, afin que les progrès se mesurent pas à pas.
Dans un autre registre, Martin Harriague, Xenia Wiest et le collectif Kor’sia ont en commun d’avoir été révélés lors d’un Concours de jeunes chorégraphes de Ballet et de trouver une place naturelle dans cette 34e édition du Temps d’Aimer la Danse. Le jury de ce prestigieux concours, constitué notamment par le Ballet de Biarritz, celui de Bordeaux et celui du Rhin, a donc bien fait d’aider ces trois-là en leur mettant le pied à l’étrier. Ce concours sert à repérer les écritures déjà capables d’ordonner de grands ensembles et à aider leur réalisation. La leçon vaudra peut-être demain pour les talents émergents qui mijotent au festival.
Au-delà des problématiques propres aux ballets, qui sont le manque de troupes et de moyens, l’aide aux jeunes chorégraphes reste un enjeu vital du monde de la danse. Un apport à la création, un « enrichissement » même, glisse Argia Doyhamboure Hourcade.
Le festival de Biarritz a toujours accompagné la création et permis de belles révélations, à l’échelle de grands Ballets, de productions locales, sans parler du festival transfrontalier de danse de rue Dantza Hirian qui promeut au Temps d’aimer de jeunes artistes. Des petites choses qui en disent long.
Rémi Rivière
Le festival Le temps d’aimer la danse se tient jusqu’au 16 septembre à Biarritz.
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