« We are french touch » : le courage au service de la maturité

Une ouverture marquée par l’absence de Rachida Dati

Au salon We Are French Touch, Nicolas Dufourcq, Nicolas Parpex, et, à distance, Rachida Dati, ont célébré la singularité des industries culturelles françaises et placé le courage au cœur de cette journée. Dufourcq a retracé une année marquée par l’effervescence créative et par le rôle central de la culture dans l’économie. En vidéo et en trois minutes chrono, Rachida Dati a appelé au « courage », le grand thème de cette édition, face aux défis de l’intelligence artificielle, rappelant l’importance du modèle culturel européen fondé sur le droit d’auteur et du soutien de l’État via France 2030. Nicolas Parpex a souligné l’essor remarquable de la French Touch, devenue un mouvement international et un modèle unique mêlant création, singularité et innovation. Il a également rappelé que l’IA est « un extraordinaire accélérateur de créativité et de création de valeur, à une condition : qu’elle reste au service du talent créatif humain, et non l’inverse ».
Ensemble, ils ont affirmé une vision commune : une culture française inventive, singulière et ouverte au monde.

Scroll Like Repeat : quand médias et créateurs inventent de nouveaux modèles

Lors de la conférence « Scroll Like Repeat : quand médias et créateurs inventent de nouveaux modèles », des représentants de France Télévisions, TikTok, du Crayon et de l’UMICC ont dressé le constat d’une convergence sans précédent entre médias traditionnels et créateurs de contenus. Le marché français de la creator economy, en pleine croissance, estimé à 6,3 milliards de dollars et 300 000 créateurs, transforme profondément les usages avec quatre heures de vidéo par jour, dont 52 minutes quotidiennes passées sur YouTube par les Français. Face aux enjeux d’information et de désinformation, notamment en vue des élections de 2027, Michèle Benzeno, membre de l’UMICC, évoque une charte récemment lancée par l’Union, visant à labelliser les créateurs d’information et à renforcer le fact-checking. L’hybridation des formats, illustrée notamment par le succès du GP Explorer, diffusé simultanément sur France 2 et Twitch, marque une nouvelle ère où créateurs de contenus et diffuseurs traditionnels collaborent étroitement.

« L’aura du live » & Master Class « Justice et Air en tournée » : la puissance du live décodée

La journée a fait une belle place aux enjeux du live avec deux conférences remarquables qui ont offert de précieuses perspectives à tous les passionnés d’expériences « dans la vraie vie ».
La table ronde « L’aura du live », modérée par la directrice générale d’Ekhoscènes, Malika Seguineau, a réuni un très beau panel d’experts du sujet, qui s’accordent tous sur un point : une véritable hybridation des expériences et des savoir-faire entre l’événement physique et son amplification numérique, laquelle pèse désormais presque autant dans la balance économique d’un projet live. Matthias Leullier, DGA de Live Nation, a souligné l’appétence des jeunes générations pour l’expérience vécue, démontrée par de nombreux exemples récents : Aya Nakamura qui va remplir trois Stades de France, la résidence d’Adele à Munich… Un constat confirmé par Fabienne Moszer, de Paris Entertainment Company, qui englobe le Bataclan, l’Accor Arena et l’Adidas Arena. Pour elle, le live est un média expérientiel à part entière, où les marques viennent à la rencontre des publics.
Cette dimension expérientielle était parfaitement illustrée par Derek Barbolla, fondateur et DA de Cercle, à travers l’expérience immersive Cercle Odyssey : comment passer d’un projet centré sur le streaming à une expérience physique immersive et innovante, sans captation. Une démarche d’invention de nouvelles expériences également évoquée par Tristan Desplechin, responsable de Banijay Live, nouvelle entité du groupe audiovisuel dédiée à la production de déclinaisons live de franchises entertainment, et qui travaille actuellement à l’adaptation de Black Mirror en escape game ultra-technologique, ou de Koh-Lanta en action game.
Tous ces nouveaux horizons reposent sur un ressort : la puissance des communautés et des « fan bases ». Ainsi, Gregg Bywalski, directeur de Webedia Creators, souligne la capacité des créateurs de contenus à engager très rapidement leurs communautés, citant notamment des phénomènes comme le Z Event, les ventes de billets pour découvrir le film d’Inoxtag en salle, ou encore le Popcorn Festival lancé par Domingo, qui vend l’intégralité de ses 8 000 places en quatre minutes.

Tous ces nouveaux aspects du live étaient parfaitement synthétisés par la masterclass « Justice et Air en tournée : la French Touch au-delà des frontières », modérée par Olivier Darbois, président d’Ekhoscènes et directeur de Corrida. Autour de lui, Christel Martinet et Emmanuel Mouton, respectivement productrice déléguée et directeur de production des tournées d’Air et de Justice, ont évoqué les défis économiques et techniques de ces deux succès internationaux, qui démontrent que la musique française sait s’exporter et conquérir des publics du monde entier lorsqu’elle invente de nouvelles voies.

Conférence Flow : rencontre entre un film d’animation et son public sans frontière

La conférence « Flow : rencontre entre un film d’animation et son public sans frontière », en présence de Ron Dyens, CEO de Sacrebleu Productions, présentait le succès international du film d’animation Flow, produit pour un budget de 3,5 millions d’euros. Ce film sans dialogues, mettant en scène des animaux dans un univers post-apocalyptique coloré et joyeux, a rencontré un succès critique et public exceptionnel.
Le producteur explique les choix créatifs audacieux : absence de personnages anthropomorphes, absence de storyboard traditionnel, utilisation de Blender. Il aborde également la stratégie de coproduction européenne (France–Belgique–Lettonie) et le triomphe aux Oscars face aux studios américains. Il évoque aussi les enjeux de développement de la propriété intellectuelle — domaine dans lequel les pays asiatiques excellent — tels que le merchandising, les concerts symphoniques et les produits dérivés, ainsi que la nécessité pour l’animation européenne de proposer une alternative créative face aux géants américains et à l’arrivée de l’intelligence artificielle.
Il a par ailleurs présenté deux projets de séries : Esther et La Brigade chimérique.

Le cirque à l’honneur pour clôturer la matinée

Peggy Donck, directrice générale du Centre National des Arts du Cirque, est intervenue en fin de matinée pour clôturer une séquence de haute voltige. Après son intervention sur la grande scène du Plein Cadre, Mathieu Antajan, directeur pédagogique du CNAC, et ses talentueux élèves ont fait vibrer le Palais Brongniart avec leurs étonnantes prouesses aériennes.

Conférence Forces créatives dans un monde incertain : les stratégies de résilience des entreprises françaises

Après une pause déjeuner, nous voilà de retour pour une conférence sur le thème de l’adaptabilité : « Forces créatives dans un monde incertain : les stratégies de résilience des entreprises françaises ». Autour d’une table ronde animée par Myriam Kitar, Geoffroy Sardin (directeur général de Pull Up Entertainment), Antoine Courtois (à la tête du groupe Ateliers de France) et Jérôme Perrod (CEO de Buffet Crampon) débattent de la manière dont des entreprises françaises résistent, et même prospèrent, à travers les différentes crises des dernières années.
Dans un monde où l’incertitude est presque toujours la règle, comment transforme-t-on une crise en opportunité pour les industries créatives ? Vaste question. Pour Antoine Courtois et Ateliers de France, groupe spécialisé dans la restauration du patrimoine et le luxe — dont les activités s’étendent du château de Versailles à la Maison-Blanche — la réponse se fait par l’exemple. Comme lors d’un chantier en Ukraine, interrompu à cause de la guerre puis repris durant celle-ci, et finalement mené à son terme l’an dernier, alors même que la situation paraissait inextricable.
Mais il n’est pas seul : pour Geoffroy Sardin et la boîte de jeu vidéo Pull Up Entertainment, il a fallu gérer l’après-Covid, qui a été un gros boom pour le secteur. Après cette surchauffe, il fallait anticiper, savoir se repositionner, et se concentrer davantage sur les marchés de niche. Et quid de Jérôme Perrod et Buffet Crampon, leader mondial dans la fabrication d’instruments à vent ? S’adapter avec les clarinettes rendues silencieuses à l’aide d’un module électronique, fortement développé au moment du Covid. Un bel exemple de résilience donc, pour des entreprises françaises qui sont de véritables piliers dans leurs secteurs. Le roseau plie mais ne rompt pas.

Clubbing au Grand Palais Immersif : du dancefloor au musée, une histoire immersive de la culture club

Créé par Vinci pour promouvoir les initiatives immersives, le Grand Palais Immersif accueille une belle initiative : l’exposition Clubbing. Pour cette interview croisée, gracieusement offerte par Delphine de Canecaude et Pierre Giner, nous nous plongeons avec eux dans cette aventure immersive au thème surprenant : les clubs. Pierre Giner, artiste et scénographe, voulait créer un lieu de rencontre pour plusieurs communautés différentes, faire converger le lieu, l’expérience et le sujet. Soixante-dix pour cent des adultes ne vont pas au musée. Un petit drame. La réponse est-elle dans l’immersion ? En tout cas, pour Delphine de Canecaude, s’il ne faut pas tomber dans le tout numérique et immersif, le numérique reste une composante essentielle de la problématique. Dans l’hybridité entre l’objet et l’immersion.
Ils ont monté cette exposition en quatre mois, un temps record. Entourés d’acteurs et de connaisseurs de la scène et de l’histoire du clubbing, ils ont réussi à proposer une expérience unique. Il ne nous reste plus qu’à danser ?

Bref, j’ai été à une conférence sur Bref 2

Treize ans après la première saison, Harry Tordjman raconte comment « Bref 2 » est né de manière totalement organique. « On avait clos quelque chose, on ne comptait pas revenir. » Puis un jour, Kyan Khojandi et Navo arrivent avec « plein d’idées » et une évidence surgit : « Bref peut être le véhicule parfait. » Aucun diffuseur derrière, seulement cette envie. Le format long s’impose en écrivant : « On s’est rendu compte qu’on avait énormément de choses à dire. »
Harry raconte aussi l’anecdote du secret, gardé grâce au faux titre « L’embarras du choix », inscrit partout, contrats compris. Même les partenaires signent des NDA pour maintenir la surprise. Disney s’aligne très vite : « Ils ont compris précisément ce qu’on voulait faire. »
Le public, lui, suit massivement. Harry confie recevoir des messages de gens « touchés intimement », étonné de l’ampleur d’un phénomène que l’équipe n’a jamais calculé. Une aventure née d’une intuition, d’un trio soudé et d’un immense plaisir de créer.

L’espoir d’une Europe culturelle puissante

La table ronde « Vers une Europe culturelle puissante », organisée dans la Salle Grand Angle du Palais Brongniart, réunit Françoise Benhamou (économiste, vice-présidente du Comité consultatif des programmes d’ARTE), Aurélie Champagne (directrice adjointe des affaires juridiques et européennes au CNC) et Laure Pressac (directrice de Beaux Arts & Cie), sous la conduite de Sébastien Thévenet (directeur délégué du plan French Touch à Bpifrance).
Au cœur des échanges, une question simple et décisive : quelle place l’Europe peut-elle occuper dans les équilibres mondiaux, et comment le soft power culturel peut-il contribuer à la hisser là où on la souhaite — reconnue, influente et audible ?
Françoise Benhamou rappelle, à travers Sloterdijk, la difficulté persistante à faire sentir l’Europe comme une entité incarnée. La culture devient alors l’un des rares leviers capables de cimenter ce collectif abstrait. Aurélie Champagne précise le rôle déterminant de l’exception culturelle : depuis la fin des années 1940, le cinéma échappe délibérément au libre-échange dans les négociations commerciales, car l’Europe considère que la culture n’est pas un bien comme un autre. Elle alerte aussi sur les tensions nouvelles créées par les plateformes et l’hyperabondance de contenus, et mentionne le dernier film de Rebecca Zlotowski, avec Jodie Foster, comme exemple d’une œuvre que l’Europe rend possible lorsque d’autres modèles l’auraient bloquée.
Laure Pressac insiste, pour sa part, sur les actes concrets qui fabriquent une culture commune : capitales européennes de la culture, projets franco-belges, et notamment le travail mené autour de l’Hôtel de Ville de Mons, où la réouverture d’un parcours de visite tisse un récit européen à partir d’un lieu ancré. Autant de gestes qui prouvent que l’Europe se construit aussi par des histoires locales qui, mises bout à bout, forment un paysage partagé.
À mesure que la discussion avance apparaît une Europe en pleine recomposition, consciente que sa puissance culturelle ne dépend ni de slogans ni de stratégies brutales, mais de sa capacité à protéger la diversité, accueillir des œuvres singulières et faire émerger des imaginaires capables de la représenter dans le monde.

Danse et mix à l’honneur dans le grand final

Le show a commencé vers 18 h dans la grande salle du rez-de-chaussée, où les speakers individuels se sont succédé toute la journée pour des talks à la TEDx. On y a retrouvé pas mal d’artistes qui ont donné corps et âme aux cérémonies officielles des JO.

L’énergie explosive et la générosité des Mazelfreten se sont à nouveau illustrées dans une véritable petite pièce d’une quarantaine de minutes, dans le mélange hip-hop électro qui constitue leur signature. Avec également un long moment de tendresse très bienvenu, et sous un éclairage parfaitement maîtrisé pour que l’on voie leurs visages hyper-expressifs. Beaucoup d’humanité avant de danser au son de Barbara Butch, très soft and sweet, qui a commencé son mix, sans transition aucune, par Gilbert Montagné et les Spice Girls. Une vraie soirée de mariage entre la culture et l’avenir.