Dans le dernier film de Jafar Panahi, qui a obtenu la Palme d’or du Festival de Cannes, la simplicité du propos et la sensibilité des personnages n’échappent pas à un certain manichéisme. Chronique d‘Un simple accident.
Que feriez-vous si vous vous trouviez fortuitement en présence du bourreau qui vous a fait subir mille sévices et a abîmé votre vie et celle de vos proches à jamais ?
C’est la question fondamentale posée par Un simple accident. Vahid, un homme, probablement ouvrier, va croiser le chemin d’Eghbal (Ebrahim Azizi) surnommé « la guibole » (en raison de sa jambe amputée). L’assommant, le capturant, essayant de l’enterrer vivant, il va être saisi d’un doute sur l’identité du possible monstre et va embarquer dans son van d’autres victimes des exactions afin de tirer l’affaire au clair.
Les preuves s’accumulent, mais même les plus déterminés (Golrokh (Hadis Pakbaten) et Hamid (Mohamad Ali Elyasmehr) formidables) échouent à mettre en œuvre une vengeance, et surtout la torture ou l’exécution sommaire dont Eghbal était coutumier. En somme, ils ne se résolvent pas à répondre à la violence par la violence. Les scènes s’enchaînent alors de manière tantôt très fortes lorsque les protagonistes entrent en conflit et rappellent ce qu’ils ont subi, tantôt comiques, voire légères, tant on a affaire à des pieds nickelés…
Le petit problème du film, c’est qu’à force de vouloir dépeindre des « très gentils » face à un « très méchant », le film prend, le temps du sauvetage de la femme d’Eghbal sous les yeux attendrissants de sa fille, un peu trop le goût du manichéisme. Cela n’empêchera le retour au sujet du sort réservé à Eghbal avec deux scènes finales d’une incroyable force ; l’une dans laquelle la femme (Shiva (Mariam Afshari)) terrasse psychologiquement l’homme qui crie ses regrets ; l’autre qui laisse planer un doute sur la conclusion violente de l’épopée.
Par son minimalisme et son réalisme ordinaire, Un simple accident s’affirme comme un film politique dans lequel le parcours de ces gens simples sonne comme un implacable réquisitoire contre le régime iranien. Un film social et humain que, pour cette raison, le jury du Festival de Cannes a décidé de couronner de la Palme d’or.
Un simple accident, de Jafar Panahi, avec Vahid Mobasseri, Maryam Afshari, Ebrahim Azizi, Hadis Pakbaten, Majid Panahi, Mohamad Ali Elyasmehr, Georges Hashemzadeh, Delmaz Najafi, Afssaneh Najmabadi Iran, 1h45, palme d’or au 78e Festival de Cannes, sortie française le 10 septembre 2025.
Visuel © Jafar Panahi / Memento films