L’iconique cabaret littéraire de Théâtre Ouvert a été présenté en clôture de la première journée des Belles Heures. Un événement organisé par Arcena, la Maison Jean Vilar et la SACD, qui se poursuit aujourd’hui encore à la maison Jean Vilar, en entrée libre. Un moment aussi chic que drôle.
Est-ce que c’est gênant de chanter Ma meilleure amie de Lorie dans la calade de la Maison Jean Vilar, en plein Festival d’Avignon ? La réponse est non. C’est même trop bien. Et ça a été rendu possible grâce au Cabaret du Théâtre Ouvert, accueilli dans le cadre des Belles Heures d’ARTCENA. Cet exercice délicieux clot chaque année le festival du Jamais Lu. Et le voici debarquant à Avignon pour le meilleur, en rassemblant le meilleur des auteurices : Marcos Caramés Blanco, Agathe Charnet, Théophile Dubus, Raphaël Gautier, Vanasay Khamphommala, Iris Laurent, David Lescot et Lydie Tamisier.
L’idée de ce cabaret, c’est de rassembler des comédien·ne·s, des auteur·rice·s, autour d’un thème. Cette année, la commande portait sur « les nouveaux vocables ». C’est une forme de résistance face à l’air du temps qui se couvre sévèrement. La troupe est accompagnée à la guitare par Sébastien Martel qui, fidèle à sa légende, construit des boucles et des boucles à l’aide de sa guitare électrique.
C’est vraiment un festival dans le festival. Lydie commence avec le mot « gênance ». Elle dit : « Quand j’ai su que je devais écrire un texte sur la gênance, je me suis dit que c’était le mieux. » Elle trouve que « gênance » est un mot sympathique, et elle s’interroge sur l’utilité des mots : est-ce que tous les mots sont nécessaires ? Par exemple, « espérance » : qu’est-ce qui le distingue de « l’espoir » ? On avance ensuite avec des mots comme « ghosté », « polyamour », « sororité »…
C’est un véritable festival de talents, puisque chaque auteur et autrice a écrit dans sa propre langue, dans son esthétique, dans sa voix. David Lescot fait presque un rap sur l’éco-anxiété. Vanasay Khamphommala invite le laotien comme langue du Festival d’Avignon et nous fait entendre que, parfois, le silence est une langue en soi. Elle raconte qu’au Laos, lorsqu’une personne prononce un discours, quelqu’un reste silencieusement à ses côtés. Juste pour la soutenir. Elle dit : « C’est un paratonnerre pour la honte. »
Les mots se succèdent et dessinent un portrait très juste de l’air du temps. Et parfois, de manière élégante, ils prennent le contrepied. Par exemple, sur le polyamour, une autrice affirme qu’elle n’est pas d’accord. Qu’elle a envie d’aimer une seule personne, pleinement, sans avoir à la partager.
On apprend aussi qu’on peut être un très grand garçon, une très grande fille… et avoir encore un doudou. Et surtout, pleurer très fort quand ce doudou, en toute autonomie, décide d’aller voyager dans d’autres ailleurs. Théophile Dubus nous enchante et convoque même Mylène pour finir de nous faire fondre.
Au délà de la fête, ce cabaret est un acte fort qui fait entendre que la langue est vivante, que chaque génération invente ses termes. Elle montre aussi comment se tissent les partenariats entre les institutions, puisqu’une telle soirée est rendue possible grâce à l’union de Théâtre Ouvert, d’ARTCENA et de la Maison Jean Vilar. Les Belles Heures se prolongent toute la journée, ce 11 juillet, à la Maison Jean Vilar en entrée libre.