Tout change, et pourtant, des choses restent. Les chrétiens forment toujours le premier groupe religieux au monde, fort de plus de 2 milliards de personnes, et quand le pape meurt, on ressort depuis des siècles les mêmes protocoles. Aujourd’hui, on les regarde depuis notre smartphone davantage que derrière notre télévision, mais le monde entier a bien vu la chambre du pontife être scellée et le monde entier suivra dans quelques jours le conclave, scrutant la couleur de la fumée en direct. On ne sait pas, on ne saura pas ce qu’il va se tramer derrière ces murs clos, mais depuis que les réseaux sociaux ont envahi nos vies, et qu’Edward Berger a réalisé son film Conclave, on a tout de même la sensation que ce qui était secret est public.
Et une fois publique, la cérémonie change de statut, elle devient un rituel collectif, un repère, une part de commun, les murs qui tiennent la maison même quand tout se casse la gueule. Notre vie est remplie de rituels, de cérémonies. Chacun•es les siennes. Il y a celles et ceux dont la matinée est calée à la minute prêt par une matinale radio, celles et ceux qui savent en fonction des feux rouges ou de quel métro iels attrapent s’iels seront dans les temps, celles et ceux dont les soirées sont rythmées par des « va prendre ta douche », « à table ! », « les dents, pipi et au lit ». Bref, nos vies ne sont que de grandes cérémonies protocolaires ritualisées sans que l’on ne s’en rende compte, des cérémonies privées mais communes qui nous font faire société.
Une pensée de saison nous traverse alors… Si la semaine dernière un ciel est gris et frais tronait, depuis lundi la chaleur s’abat sur nous. Force est de constater que nous sommes au printemps, une saison de renouveau et d’instabilité. Paradoxalement, cette période est le lieu et le moment de nombre de cérémonies, toutes plus protocolaires les unes que les autres. Hier soir se tenait la cérémonie de remise des Molières, avec ses discours, ses remerciements, ses clips et ses longueurs. Dans quelques jours, le tapis rouge va se déployer à Cannes et entraîner avec lui, montée des marches, costards et talons hauts, discours, applaudissements polis ou enthousiasmes, projections, fêtes… Tout cela jusqu’au climax de la remise de la Palme d’or. Et dans quelques mois, à Avignon, comme chaque année, les trois coups de bâton version Maurice Jarre retentiront avant les levers de rideau du festival.
S’ils nous embêtent parfois, ces rituels, si on trouve parfois ces cérémonies ridicules ou pesantes, tout ce protocole constitue un cadre dans lequel se bâtir, que ce soit en s’y conformant ou en l’explosant. Alors saisissez-vous de ces rituels, et surtout créez les vôtres !
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