Le front commun mené par les auteurs et les éditeurs contre le festival de la BD d’Angoulême (FIBD) prend un nouveau tournant. Le prochain numéro de l’événement, qui doit se tenir en janvier prochain, semble en effet plus que compromise : les grands éditeurs de bande dessinée ont officiellement annoncé qu’il ne viendrait pas. Selon toute vraisemblance, l’édition 2026 ne pourra pas avoir lieu.
C’était à prévoir ! Après deux semaines tumultueuses, il semble que l’on puisse le dire haut et fort : le FIBD n’aura pas lieu en 2026. Une affirmation péremptoire et lourde de sens, évidemment. Elle fait suite à un communiqué du Syndicat national de l’édition (SNE) diffusé hier, qui clame que le festival ne pourra pas avoir lieu en janvier. Le contexte n’y est pas assez favorable et la défiance envers les instances organisatrices, trop importante. Tout de même, le communiqué se veut rassurant et indique que les éditeurs “participeront au renouveau engagé par les pouvoirs publics pour construire le festival de demain dès 2027, et contribuer à faire rayonner la bande dessinée en France et à l’étranger”. Nous voilà rassurés.
La crise est aiguë, et le remède, introuvable. Cette décision, à plein d’égards justifiée, fait suite au refus d’une kyrielle d’auteurs et d’autrices de reculer dans leurs intentions de boycott du FIBD. Pour rappel, depuis la dernière édition de l’événement en janvier dernier, la gestion du festival est sous le feu des critiques et notamment la société 9ᵉ Art+, société gestionnaire du festival depuis presque 20 ans. Que lui reproche-t-on ? Entre autres, son manque de transparence, des dérives commerciales et humaines, dont notamment un limogeage en 2024 d’une salariée juste après qu’elle a déposé plainte pour viol.
Comme si ce n’était pas assez, ladite société, pourtant la cible de très nombreuses attaques dans le monde de la BD, avait tout de même été reconduite à la tête du festival, à la suite d’un appel à projet pour le moins rocambolesque où elle avait fini par s’associer, à la demande du FIBD, à l’autre finaliste, la Cité internationale de la BD. Pour 9 ans, rien que ça. Heureusement, après le tollé suscité par le résultat, cet appel d’offres a été annulé. Ouf !
Oui mais voilà, la direction du festival de la BD, de concert avec les pouvoirs publics, souhaite que l’édition se tienne tout de même en 2026. Dans un autre communiqué, paru mercredi matin quelque peu après 10 heures, le FIBD évoque pour sa part le fait que les discussions sont toujours en cours pour que l’édition 2026 ait lieu. Le FIBD précise « que les financeurs publics de la manifestation sont en permanence dans le dialogue avec les représentants de différentes instances représentatives de ces mêmes acteurs, les syndicats d’autrices et d’auteurs et d’éditeurs et que des réunions sont fixées avec eux dans la semaine. »
La région Nouvelle-Aquitaine, principal financeur public de l’événement, a déjà fait part de sa « volonté d’avoir une édition en 2026 ». Selon Frédéric Vilcocq, conseiller culture de la collectivité dirigée par le socialiste Alain Rousset, une année blanche pourrait, selon lui, être « fatale pour le festival ». Pour sa part, le ministère de la culture, qui finance également en partie cet évènement, estime qu’« On est à un tournant dans l’histoire du festival qui est en difficulté et en danger ». La question que nous sommes en droit de nous poser, de notre coté, c’est : est-ce que la bonne tenue de l’iconique festival est elle-même encore possible ? Là-dessus, il y a de quoi avoir de sérieux doutes.
Visuel Principal : Librairie de la Cité international de la BD © Julien Magnan