Jean-François Kahn, journaliste et essayiste, s’est éteint à l’âge de 86 ans le 23 janvier 2025, laissant derrière lui une empreinte indélébile dans le paysage médiatique français. Fondateur de L’Événement du jeudi et de Marianne, il incarnait un esprit libre, une intelligence hors norme et une capacité rare à conjuguer passion et réflexion critique.
Kahn était un homme de débat, un esprit anticonformiste qui n’hésitait jamais à se remettre en question. Il rejetait les étiquettes figées et prônait la liberté d’interroger tout, sans tabou : des institutions politiques aux croyances religieuses, des élites aux classes populaires. Ce centrisme teinté d’audace et d’irrévérence lui a permis de cultiver une ligne éditoriale unique, où la complexité du monde était sans cesse mise en débat avec vigueur.
Avec L’Événement du jeudi, fondé en 1984, puis Marianne, lancé en 1997, Jean-François Kahn n’a pas seulement créé des journaux, il a forgé des espaces d’engagement et de critique sociale. Refusant la complaisance vis-à-vis des puissants, il n’hésitait pas à heurter les sensibilités, qu’il s’agisse de ses lecteurs ou des figures politiques qu’il attaquait. Sous sa houlette, Marianne était un manifeste en faveur de la République, défendue avec passion et sans compromis.
Homme de son siècle, Jean-François Kahn portait un amour profond à l’Histoire et à ses symboles. Son attachement à des lieux comme le moulin de Valmy, qu’il qualifiait de « plus important que le Vatican », révélait son lien viscéral à l’idée républicaine. Mais son attachement à la République s’accompagnait aussi d’une inquiétude profonde pour son avenir, en particulier face aux fractures sociales et au risque de guerre civile, une hantise qui le poursuivait.
Jean-François Kahn était un personnage singulier, à la fois provocateur et bienveillant, incisif, mais jamais insultant. Sa plume, comme son éloquence et son art du débat, révélait une vivacité intellectuelle rare.
Avec lui disparaît une figure d’un journalisme audacieux et humaniste, un homme qui aura su cultiver l’art du doute et de la réflexion libre. Si la République avait une voix, celle de Jean-François Kahn en était l’écho vibrant et indomptable.
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