Lorsque le couple de 19 ans formé d’Hugo, jeune introverti, sobre et timide, et de Queen, esthéticienne aux ongles longs, tenues flashy et caractère expansif, arrive sur l’île atlantique où Hugo a l’habitude d’aller tous les étés, il attire les regards. Avec son premier long-métrage, L’épreuve du feu, Aurélien Peyre nous fait découvrir des personnages profonds, attachants, parfaitement construits et une histoire extrêmement touchante.
On comprend vite qu’Hugo a eu une enfance difficile. Timide, calme et un peu peureux, il a le profil-type du jeune qui, ado, a été harcelé. Il semble aller beaucoup mieux depuis que Queen, sa nouvelle – et probablement première – copine, est arrivée dans sa vie. Complètement aux antipodes du jeune homme, Queen est – ou en tout cas paraît être – sûre d’elle, curieuse et extravertie. Ce couple à la dynamique étrange est pourtant très vite attachant : on perçoit rapidement des instants de complicité touchante, et on réussit à voir au fur et à mesure du film la construction d’un amour qui paraît profond et fort, et auquel nous croyons.
L’histoire d’amour de Queen et Hugo n’a donc rien d’évident, mais en faisant chacun un pas vers l’autre, on sent qu’ils ont le potentiel de créer quelque chose de très beau. Pourtant, leur rencontre avec le groupe d’amis d’enfance d’Hugo va changer leur été. Aurélien Peyre nous propose une très belle réflexion sur le classisme et sur la manière dont le regard des autres peut faire changer le nôtre. On assiste à un effet de groupe pernicieux et violent, extrêmement réaliste et d’autant plus poignant.
Une des grandes forces de L’épreuve du feu repose dans la construction de ses personnages. Personne n’est laissé de côté : les deux protagonistes ont leurs histoires personnelles précises, que l’on apprend ou que l’on devine, toujours de manière très fine et subtile. Puis, chacun des personnages plus ou moins secondaires se dessine lorsque le couple rencontre la bande d’amis d’enfance d’Hugo et commence à passer du temps avec eux. Défilent alors sous nos yeux différents profils de bourgeois parisiens passants leurs vacances sur les îles atlantiques. On découvre Paul, le « chef » toxique de la bande, qui joue à des jeux cruels sans nécessairement se rendre compte de la violence de ses actes ; il y a la belle Colombe, l’étudiante en art qui se considère plus libre et indépendante que les autres mais finit tout de même par se plier par moments aux effets de groupe créés par la bande ; notons également sa petite sœur Victoire, la plus jeune et la plus innocente de la bande, la seule qui développe réellement une forme de respect pour Queen et qui cherche même par moments à lui ressembler, mais se fait juger par le reste des ados de sa classe sociale. Tous les personnages ont leur personnalité, leurs particularités, et en même temps on croit réellement au groupe que ces jeunes forment ensemble – beaucoup peuvent probablement s’y identifier – et aux effets qui en ressortent. Chaque comédien·ne joue son rôle avec justesse et l’on sent un casting réfléchi, à la fois dans le rapport des acteurices à leurs personnages et dans le rapport des acteurices entre elleux.
Aurélien Peyre nous propose un premier long-métrage sur l’amour adolescent, les relations de groupe et le regard des autres et cela nous émeut de la première à la dernière minute.
L’épreuve du feu, de Aurélien Peyre, avec Félix Lefebvre, Anja Verderosa, Suzanne Jouannet, 1h45, Film en salle le 13 août 2025.
Visuel : © Paname Distribution