C’est officiel, après des semaines de tractations, la société organisatrice du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême (FIBD) a annoncé ce lundi 1ᵉʳ décembre que l’édition 2026 n’aura finalement pas lieu. Le tout, en profitant pour se décharger intégralement de sa responsabilité, pourtant centrale dans cette affaire.
« L’édition 2026 du festival ne pourra matériellement pas avoir lieu dans des conditions appropriées », annonce 9ᵉ Art+, la sulfureuse société organisatrice du Festival international de la BD d’Angoulême, dans un communiqué publié par leurs avocats, lundi 1ᵉʳ décembre. Pour rappel, cette dernière est la principale raison du boycott de l’événement. En cause, un processus opaque quant à l’attribution de la gestion du festival ainsi que son manque de transparence, des dérives commerciales et humaines, dont notamment un limogeage en 2024 d’une salariée juste après qu’elle a déposé plainte pour viol. Un dossier sacrément lourd donc.
Mais il ne faudrait pas aller jusqu’à croire que, grevée par toutes ses critiques et constatant que plus grand monde dans la BD ne voulait d’elle, la société se retire d’elle-même. Il ne faut pas rêver : « Cette situation ne résulte en aucun cas d’un choix de la société 9ᵉ Art+, dont le FIBD constitue l’unique raison d’être, mais bien d’une décision unilatérale prise en concertation par les financeurs publics », poursuivent les avocats de la société. Il faut dire que l’ambiance autour du festival était bien morose ces derniers temps. Depuis la mi-novembre, de nombreux auteurs et autrices appellent au boycott de cette édition, amenant, de fait, un grand nombre de maisons d’édition à leur emboîter le pas. Par la suite, devant ce triste état donc, les financeurs publics ont exhorté, dans une conférence de presse tenue il y a dix jours, l’organisation à annuler l’édition 2026.
Parlant de cette même conférence de presse, la société s’enfonce : « Cette prise de parole a, de fait, envoyé un signal fort et clair à toutes les parties prenantes sur l’impossibilité d’organiser le Festival, ce qui a inéluctablement conduit, dans les jours qui ont suivi, à des retraits de la part de nombreux acteurs de l’événement (exposants, entreprises partenaires…) restés jusqu’alors impliqués dans l’espérance de sa tenue. » Une tentative à peine cachée de réécrire totalement les événements récents et d’éviter de se retrouver face à ses responsabilités. Culot, quand tu nous tiens…
Non content de s’arrêter là, les avocats poursuivent, affirmant cette fois-ci que la responsabilité de l’annulation « incombe aux financeurs publics qui n’ont cessé de s’immiscer dans la gestion, pourtant privée, de cet événement, avec la volonté manifeste d’en évincer l’organisateur historique. » Manque de peau, la société 9ᵉ Art+ ne s’occupe du projet que depuis 2007, alors que le festival existe depuis 1974.
Pour l’heure, les collectivités espèrent mettre en place une nouvelle organisation dès 2027, pour pouvoir faire revenir l’intégralité des acteurs du monde de la bande dessinée au FIBD. Mais c’est sans compter sur le très finaud Franck Bondoux, directeur de la société organisatrice, qui, par l’entremise de ses avocats, nous rappelle bien gentiment que l’organisation de cette édition « appartient juridiquement à 9ᵉ Art + ». Et ainsi de réclamer « une solution concertée » […] « pour poser les bases d’une transition apaisée vers une nouvelle gestion du Festival ». Et avec ça, vous reprendrez bien un peu de bonne foi ?
Visuel principal : © Julien Magnan