L’ancienne historienne de l’art, présidente-directrice du Musée du Louvre depuis 2021, Laurence des Cars, a présenté ce mercredi 22 octobre sa démission à la Ministre de la culture Rachida Dati, cette dernière l’a refusée.
Arsène Lupin n’a qu’à bien se tenir ! Le héros fictif de Maurice Leblanc a trouvé des alter ego bien réels.
Ce mois d’octobre aura été le théâtre de nombreux rebondissements pour la scène culturelle française. Alors que le dimanche 19 octobre avait lieu le « casse du siècle », à savoir le braquage du Musée le plus célèbre du monde, le Louvre, deux jours plus tard, sa présidente déposait sa démission.
En tout et pour tout le préjudice évalué par le Musée s’élève à 88 millions d’euros. Une perte de taille qui vient s’ajouter au déficit financier déjà conséquent de l’établissement. Un coup de massue pour la présidente-directrice.
En janvier dernier Laurence des Cars tirait la sonnette d’alarme. Dans une lettre adressée à Rachida Dati, la présidente-directrice décrivait « des défauts d’étanchéité », « une infrastructure vieillissante », et une capacité d’accueil qui n’est plus adaptée à un projet touristique et patrimonial d’envergure.
Alors qu’elle annonçait sa démission 3 jours après le braquage, Laurence des Cars reconnaît un système de sécurité « défaillant » tout en rappelant que depuis 2021 elle alerte sur «l’état de dégradation et d’obsolescence générale du Louvre ». C’est donc la goutte de trop dans un vase déjà bien rempli que la présidente et directrice essuie. Face à cette situation, Laurence des Cars déclare forfait. C’était sans compter sur la Ministre de la culture…
Suite au cambriolage, la Cour des comptes attestait d’un retard que le Musée du Louvre « n’est pas parvenu à rattraper […] dans le déploiement d’équipements destinés à assurer la protection des œuvres ». Un retard que la présidente-directrice conteste.
L’ancienne historienne de l’art a donc été auditionnée devant la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et des sports qui se tenait au Sénat ce mercredi. Elle s’est vue obligée de justifier un vol au retentissement international, et de reconnaître un système défaillant, à l’image d’une restriction budgétaire qu’elle n’a de cesse de dénoncer depuis un peu plus de 4 ans. Effectivement, les cambrioleurs ont pénétré dans la galerie Apollon, pour y dérober les joyaux de la Couronne française sans qu’aucune alarme ne se déclenche. Pour résoudre ce problème majeur, Laurence des Cars propose l’installation d’un commissariat de police au sein même du Musée. Elle a également évoqué « la sécurisation des abords immédiats du Louvre, en particulier de la chaussée » comme une solution envisageable à court terme.
Emmanuel Macron a quant à lui demandé une accélération, « des mesures de sécurisation du Louvre étaient en cours de déploiement et il a demandé une accélération de ces mesures » via l’intermédiaire de la porte-parole du gouvernement.
La présidente-directrice appelait aussi en janvier à « un soutien financier d’urgence », annonçant un défi de taille pour le Musée le plus visité du monde. Un lieu qui a inspiré tant de fictions, de la littérature au cinéma, dont la très jolie série Belphégor, le fantôme du Louvre avec notamment la chanteuse Juliette Gréco. Le défi est en effet de taille… L’arrivée de ce braquage ne vient qu’accélérer les prédictions de Laurence des Cars.
Sur les talons de la présidente-directrice, la responsable de la sécurité défend son personnel en mettant en avant le professionnalisme et la réactivité des agents de sécurité qui « sont intervenus vis-à-vis du public et ceux qui sont allés courir après les braqueurs et les ont mis en fuite ». En revanche, elle assure que la fenêtre par laquelle voleurs ont pu accéder à la galerie n’étant en rien « fragile « et qu’elle présentait un vitrage « sécurisé ».
Pour les élus de gauche « la responsabilité de Rachida Dati dans ce fiasco est engagée ». Un évènement qui tombe mal pour la Ministre candidate aux municipales au nom du parti Les Républicains. Même si cette dernière reconnaît un système de surveillance vidéo limité à l’extérieur du Musée, elle déplore une « instrumentalisation honteuse de cet évènement ». Selon elle aucuns systèmes « n’a été défaillant » dans la galerie.
Un braquage en appelant un autre, le Musée de Langres en Haute-Marne a lui aussi été la cible des cambrioleurs. Un jour après le « casse du siècle » un vol de pièces d’or et d’argent a eu lieu au sein du Musée, c’est le patrimoine français qui est alors mis à mal et par ricochet la Ministre de la Culture.
Bien que cette dernière soit placée en ligne de mire depuis les évènements dans les médias, c’est bien Laurence des Cars qui se trouvait face aux membres de la commission de la culture.
Pour autant, le Musée a rouvert ses portes ce même mercredi : les visiteur.ices venu.es du monde entier se disent soulagé. es. Néanmoins la galerie Apollon reste inaccessible au public. Une réouverture sous « haute-tension » à l’image d’une culture mise à mal que les derniers évènements viennent enfoncer un peu plus dans l’abîme financier.
Un 22 octobre haut en couleur qui s’est déroulé en 3 actes : l’audition de de Laurence des Cars, l’annonce de sa démission puis son refus.
La présentation de la démission de Laurence des Cars reflète l’état actuel de la culture: à bout de souffle. Le refus de cette démission par la Ministre Rachida Dati illustre lui l’aveuglement obsessionnel des politiques face à cette situation.
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