« La Seine en Folie » : le 8 novembre 2025, la Seine Musicale consacre une journée entière à la santé mentale. Tables rondes, témoignages, concert, pièce de théâtre s’enchaînent et en soirée une comédie musicale « Extra OrdinaireS » clôturera la journée.
La santé mentale a été déclarée « Grande cause nationale 2025 ». Avec le soutien du département des Hauts-de-Seine et de la région Île de France, la Seine Musicale s’est emparée du sujet. La journée a été conçue et organisée par l’association ARPE Psy 92. L’enjeu est majeur, alors que trois millions de français-es souffrent d’un trouble psychique majeur, elle vise à informer et à de-stigmatiser. Il faut vaincre l’ignorance et la peur, redonner l’espoir, modifier les représentations de la société et des malades eux mêmes.
En arrivant le visiteur arrive au « village » qui regroupe les stands des associations impliquées. Il va se révéler être un lieu d’échanges fructueux, permettant la découverte d’associations locales comme Premier secours en santé mentale qui forme des secouristes en santé mentale et Unafam qui aide familles et proches des patients. Mais le « village » accueille aussi une librairie improvisée où les auteurs-es peuvent dédicacer leurs ouvrages et l’exposition Trajectoires intimes dont les peintures ont été réalisées par un atelier d’art thérapie.
En cette matinée pluvieuse de novembre, les spectateurs arrivent lentement, le métro était fermé pour travaux…mais ils vont finalement être au rendez-vous. Au delà des professionnels de santé et des personnes concernées par un trouble psychique, le public s’avère être divers, avec des personnes de tout âge et mêmes des enfants et des adolescents. L’ambiance est bienveillante permettant la participation de chacun.
La première table ronde est consacrée à la dépression du post-partum. Les chiffres sont impressionnants, une femme sur six serait concernée. Les intervenants ont insisté sur les difficultés du parcours de soin, l’indispensable prévention, le rôle des sages femmes référentes. L’auditeur découvrira Mamans Blues, une association d’écoute et de soutien et Devenir Papa, un groupe de parole pour jeunes pères. La deuxième table ronde aborde les troubles du neurodéveloppement, principalement le spectre autistique et le TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité). L’ information, pragmatique, adaptée au grand public, est de qualité. Sur l’écran apparaissent les mots clés et des dessins ludiques, une bande dessinée s’affiche sous nos yeux. Les intervenants insistent, il faut changer le regard: la neuro-atypie n’est pas une maladie mais une autre façon d’être au monde depuis la naissance. Il faut aussi changer le système et cela passe par l’inclusion, de la maternelle, à l’université et à l’entreprise. La dernière table ronde s’attache au rétablissement, la condition du retour à l’autonomie. Elle met en valeur les collectifs et associations de malades qui permettent entraide et partage d’expérience.
Les témoignages de « patientes » ont été passionnants. Abigaïl Barrand après un diagnostic douloureux a décidé, pour se rétablir, de réaliser son rêve. Elle a traversé, en stop, douze pays pour voir les aurores boréales. Son livre Au bord de ma vie relate cette aventure. Léa Vigier a sillonné la France avec une pancarte : « J’suis bipolaire, tu m’invites » pour vaincre la honte, cette honte qui empêche de se soigner. De ce voyage elle en a tiré un documentaire.
Mais nous sommes à la Seine Musicale, place à la musique. La violoncelliste Thui-Nhi-Au-Quang joue régulièrement dans des structures de soins. Aujourd’hui, avec le pianiste Paul Montag, elle nous propose de courtes pièces apaisantes. Certaines très romantiques comme Le Salut d’Amour d’Edward Edgar, une tendre sérénade. D’autres très célèbres, comme Le Cygne de Camille Saint-Saëns ou la 5ème danse hongroise de Brahms. Le concert se termine par l’émouvant Can’t help falling in love d’Elvis Presley, dans une version pour piano et violoncelle.
Thui-Nhi a une formation en sophrologie et croit dans les vertus thérapeutiques de la musique. Elle nous propose un moment de détente, une séance de relaxation collective. La salle écoute le chant du violoncelle, les yeux clos ou en regardant des paysages magnifiques qui s’affichent sur l’écran.
Il nous est également proposé une courte pièce de théâtre : Peut être demain, jouée par les membres d’un atelier thérapeutique devenu collectif d’acteurs. De petites scénettes nous font ressentir les pensées, les paroles, les silences des patients. Des malades qui se heurtent à un mur invisible à l’hôpital, en famille, au lycée. À l’injonction de l’infirmière, « respirez » ils répondent comme en écho « peut être demain ». Un écho qui termine cette pièce très véridique, très touchante.
Cette journée a été bien construite, bien menée, faisant alterner une très bonne information grand public avec des moments de détente. Elle met en valeur le rôle de la culture et de l’art dans le soin, le rétablissement des patients, la compréhension des troubles psychiques. Comme lorsque des collégiens des Hauts-de-Seine s’approprient l’expression artistique pour nous dire ce que représente, à leur âge, la santé mentale. Ils nous émeuvent avec leurs dessins, textes, vidéo, chanson. Leur message est clair: pour eux la santé mentale, « c’est très important ». Comme pour nous tous…car nous sommes tous concernés.
Visuel © : Affiche de l’événement La Seine en Folie