Les Américain·es ont donc réélu à leur présidence un homme qui prend sans demander et qui continue à user et à utiliser, même quand on lui a dit non, (les femmes, les musiques de sa campagne…). Un homme qui a été condamné pour « falsification de documents comptables » dans l’un des quatre procès pénaux qui devaient avoir lieu en 2024. Un homme qui aurait également dû être jugé pour falsification des comptes de la campagne de 2016, pour fraude électorale en Géorgie en 2020 et pour l’assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole. Un homme qui pense qu’un mot de lui suffit pour faire advenir sa réalité et l’imposer à 330 millions d’Américain·es et au monde.
Pour toutes celles et ceux qui sont soucieux.ses de préserver l’état de droit, la démocratie et la coexistence fructueuses du melting-pot, la réélection du chantre de la post-vérité est une catastrophe et un signe d’impuissance des artistes. Même si un simple post sur Instagram de Taylor Swift peut pousser des dizaines de milliers de millennials à aller s’inscrire sur les listes électorales, cela n’a pas suffi. Même si Lady Gaga, Beyoncé, Billie Eilish se sont mobilisées avec leur voix et leur mélodies, cela n’a pas suffi. La candidature de Kamala Harris a suscité un grand espoir et la liste des stars de l’entertainment qui se sont engagées pour elles est longue, mais c’est en vain que toustes, de Eminem à Bruce Springsteen, l’ont rejointe à des meetings.
Alors qu’à la rédaction, nous sommes témoins, notamment en cinéma, d’un grand renouveau de la culture américaine avec des films indépendants de moins en moins formatés, comme nous les avons découverts au dernier Festival de Cannes. Alors que le roman « Pulitzer » de Barbara Kingsolver, la dystopie de Douglas Kennedy et le travail obsessionnel d’Andres Serrano sur la figure de Donald Trump – lui qui a, par le passé, posé son regard sur les armes, le Klux Klux Klan et le vaudou made in USA – en disent peut-être plus long que tous les articles de politistes sur l’hypnose que peut provoquer le président réélu. Certains artistes font déjà leurs valises, à l’image de l’actrice America Ferrara, qui part vivre à Londres, ou de l’autrice et universitaire Laure Murat qui a annoncé plier bagages.
Depuis Paris, comme beaucoup d’Américain·es témoins impuissant·es sur place, nous avons encore et toujours du mal à comprendre et craignons pour les minorités et les institutions des États-Unis. Non, nous ne comprenons pas comment un programme vide et des promesses faustiennes ont pu aboutir. Nous ne comprenons pas cette marche qui s’active et qui semble gagner le monde. Nous ne comprenons pas, ou ne voulons pas comprendre, qu’elle pourrait venir jusqu’à nous.
Nous aurions aimé, lectrices et lecteurs, vous écrire que oui nous savons, oui nous avons une solution pour que nous, le secteur culturel, puissions être un rempart contre la bêtise et la violence, puissions être un outil pour nous comprendre et nous rejoindre, pour recréer des ponts entre nos sociétés qui se fragmentent, un peu plus à chaque instant.
Ce vote massif ne nous empêchera pas de continuer à voir et écrire sur les objets culturels américains et à continuer à défendre une vision de la culture : ouverte, libre, exigeante.
Malgré tout cela nous vous souhaitons à tous et toutes, une belle semaine,
Amélie, Laura et Yael
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