Lieu mythique du quartier Saint-Germain-des-Prés, la célèbre librairie-galerie La Hune s’apprête à réouvrir ses portes rue Bonaparte. Après des années de transformations, de fermetures et de renaissances, cet espace emblématique de la vie culturelle parisienne entame un nouveau chapitre. Que restera-t-il de son aura d’origine ?
Le 1ᵉʳ juin 1944, trois étudiants en philosophie ouvrent une librairie dont l’escalier intérieur fait penser à la plateforme intermédiaire d’où les marins effectuent des manœuvres hautes sur les voiliers, La Hune. Tandis que Jacqueline Lemunier et Bernard Gheerbrant se marient, Pierre Roustang les laisse mener leur barque.
Gheerbrant aspire à faire de La Hune un lieu d’évènements littéraires et éditoriaux, mais aussi une espace d’exposition. Ainsi, de décembre 1944 à décembre 1975 ont lieu neuf expositions, la première étant « Aux Indes avec Lanza Del Vasto », une présentation des dessins et des aquarelles de Lou-Albert-Lasard.
En 1949, Gheerbrant décide de déménager dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés.
Comme une marque de fabrique, La Hune se retrouve de nouveau à la croisée de deux rues. En face de la brasserie Lipp et entre le café Les Deux Magots et le Café de Flore, l’endroit forme le « triangle magique » selon Gheerbrant. La librairie devient alors officiellement librairie-galerie, un espace inédit pour l’époque. Chaque mois, une nouvelle exposition s’empare du lieu. Y sont représentés des artistes comme Pablo Picasso, Man Ray, Max Ernest ou encore René Magritte : c’est le point de rendez-vous des surréalistes. Gheerbrant intègre également des expositions littéraires, photographiques, avec une pré-dominance pour la gravure.
Installée en face de l’église de Saint-Germain-des-Prés, la galerie se sépare de la librairie, suite à des travaux de réaménagement : les rayonnages de la librairie empiètent sur l’espace de la galerie.
Rachetée en 1981 par les éditions Flammarion, la librairie finit aux mains du grand groupe Madrigall, qui revend les locaux à l’enseigne de luxe Louis Vuitton, destinée à devenir leur enseigne phare au coeur de Saint-Germain-des-Prés…
La librairie déménage alors rue de l’Abbaye, à une centaine de mètres de son ancienne adresse. En 2015, elle est de nouveau en proie au groupe Madrigall, qui revend la librairie à l’éditeur français de photographies YellowKorner.
Alors que La Hune avait définitivement fermé ses portes le 14 juin 2015, elle réouvre en novembre de la même année sous le nom de « Librairie-galerie La Hune ». YellowKorner s’empare du nom de La Hune pour en faire un lieu uniquement dédié à la photographie, ce que Denis Gheerbrant, fils du fondateur, qualifie d’ « usurpation » dans une tribune publiée dans Le Monde.
Le 16 novembre 2017, la galerie-librairie est frappée de plein fouet par un incendie dévastateur lors de l’exposition Un demi-siècle dans l’Himalaya, du photographe, écrivain et moine bouddhiste Matthieu Ricard. Le 14 novembre de l’année suivante, elle est rebâtie à l’identique.
Du 5 au 14 septembre 2024, La Hune s’est transformée, sous la direction de Sarah Poniatowski, en un lieu inspirant où chaque espace évoquait une pièce de maison parisienne. À cette occasion, Sarah Poniatowski a réuni à La Hune un ensemble de talents pour célébrer la création sous toutes ses formes.
Si vous flânez du côté de la rue Bonaparte, non loin de l’église de Saint-Germain-des-Prés, vous aurez peut-être la surprise de découvrir la réouverture prochaine de La Hune, affaire à suivre…
Visuel : © Amélie Blaustein-Niddam