« La collection Nahmad. De Monet à Picasso » : Les trésors d’une collection privée
par Blanche Aloncle28.03.2025
La grandiose collection privée de la famille Nahmad s’invite au Musée des Impressionnismes à Giverny. Monet, Degas, Renoir, Moreau, Redon, Picasso… Des trésors de la modernité se lient aux impressionnismes pour une exposition entre l’intimité d’une collection et son ancrage historique.
Les trésors d’une collection privée
Le Musée des Impressionnismes et la collection Nahmad se rencontrent à l’occasion de cette exposition unique. Le conservateur du musée, Cyrille Sciamma, et David Nahmad collaborent cette année pour présenter 57 œuvres de cette collection privée, pour la plupart jamais vue du public.
Tout commence au Liban, dans cette famille de banquiers qui doit ensuite s’exiler en Italie. L’aîné des trois frères, Joe, se passionne pour l’art et achète des œuvres. A leur arrivée en Italie, l’art devient une affaire de famille. Ezra et David, à leur tour, se lancent dans la collection, chacun suivant ses propres préférences : l’un pour le XVIIIe siècle et l’autre pour le XXe siècle. Ainsi, au fil du temps, la collection Nahmad s’enrichit, notamment grâce à l’ouverture de galeries d’art. Une collection spectaculaire qu’ils n’ont cesser de dévoiler au public, lors d’expositions partout dans le monde.
Ils achètent par goût, font confiance à leur sensibilité. Cette exposition, au-delà de montrer des pièces inédites, reflète la passion de David Nahmad, ses goûts et son histoire. Se croisent alors des couleurs, l’Orient, des voyages et de la modernité.
Un « panorama de l’Histoire de l’art »
L’espace d’exposition se parcourt comme l’on verrait un panorama de l’Histoire de l’art du XIXe au XXe siècle. De Monet à Picasso : 57 œuvres ont été choisies, rendant compte de la continuité et des influences permanentes des impressionnistes. Un parcours didactique qui s’efforce de « ne pas saturer l’œil ».
La première salle est dédiée aux pères de l’impressionnisme : Corot, Delacroix, Pissaro, Sisley. Les générations qui leur succèdent s’inspirent donc du style cubique de Pissaro, des sujets féminins et de paysages de Corot, de l’aspect sériel des œuvres de Sisley.
Au cœur de l’exposition, dans deux salles assombries, se convoitent les nymphéas de Monet et les figures féminines de Toulouse-Lautrec et de Degas. Cinq œuvres de Monet, de la figuration à l’abstraction, déroulent la longue vie du peintre. Elles embarquent sur les cannotiers d’Argenteuil, les fjords norvégiens, les nymphéas de son bassin à Giverny et enfin les rochers lumineux de Normandie. Jusqu’à des abstractions multicolores, elles montrent les évolutions picturales du peintre. Toulouse-Lautrec et Degas se font face. D’un regard antagoniste, ils traitent cependant des mêmes sujets. Ami ou voyeur ? Bienveillance ou indiscrétion ?
Le parcours se poursuit et les portraits de Renoir surprennent alors les amateur.ices. Si l’on connaît Renoir pour ses scènes mondaines et son impressionnisme tardif, ici sont exposés les rares portraits d’enfants qu’il a produit. Preuves de sa tendresse et de son éducation, c’est un aspect oublié des œuvres de Renoir qui sont révélées.
Claude MONET (1840-1926) Canotiers à Argenteuil, 1874 Huile sur toile, 61,9 x 80 cm
Des tachistes aux symbolistes
Inattendue encore, la place est ensuite faite aux artistes italiens du XIXe siècle. La collection Nahmad en compte en réalité beaucoup, peut-être ces œuvres sont-elles les traces d’un passé, de souvenirs. Boldini, Fattori, Zandomeneghi, membres des « Macchialioli » (les « Tachistes») peignent de multiples tâches de couleurs caractéristiques.
Puis, le symbolisme de Moreau et de Redon s’immisce dans l’exposition. Les œuvres de Moreau, bibliques, lunaires, brillantes, illuminent ainsi un couloir sombre pour mener jusqu’aux œuvres de Redon. Transition parfaite jusqu’à la modernité, les nombreuses inspirations et influences de Redon frappent d’autant plus dans cette exposition.
Federico ZANDOMENEGHI (1841-1917) La Corbeille de géraniums, vers 1901, Huile sur toile, 91 x 60 cm
Odilon REDON (1840-1916) Figure portant une tête ailée (La Chute d’Icare), vers 1876, Pastel sur papier marouflé sur panneau, 42,8 x 44,8 cm
Échos de la modernité
Ces courants et artistes tracent ensemble un chemin vers le modernisme. Trois œuvres phares : Jeune fille à la chemise rayée d’Amedeo Modigliani, La leçon de Piano d’Henri Matisse et bien sûr Le Petit Pierrot aux fleurs de Pablo Picasso. Trois œuvres qui représentent plutôt qu’une finalité, une continuité et plus qu’un goût, une fervente passion. Le parcours est simple et didactique. Tout est présenté et acheminé comme un passage de mains en mains, mains d’artistes ou mains de collectionneurs.
Henri MATISSE (1869-1954) La Leçon de piano, 1923 Huile sur toile, 65 x 81 cm
La collection Nahmad exposée, ce dévoilement d’une collection privée aujourd’hui plus que nécessaire, montre les œuvres d’une passion, témoins d’époques et d’impressionnismes.
« La collection Nahmad. De Monet à Picasso » au Musée des Impressionnismes à Giverny.
Du 28 mars au 29 juin 2025.
Visuels : ©Collection Nahmad
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