Le terme Chaosmos, inspiré de James Joyce, fusionne chaos et cosmos pour souligner leur interdépendance. C’est aussi le nom de la nouvelle exposition du Maif Social Club, qui explore, d’archipel en archipel, la manière dont nous nous situons dans un monde instable. Justine Bougerol, plasticienne et scénographe, y présente Espèces d’espaces, une œuvre immersive où l’espace devient acteur à part entière. Une montagne blanche surgit du mur, percée d’une brèche qui aspire le regard vers un ailleurs énigmatique. Entre lumière et matière, l’artiste invite à une expérience où la perception vacille et se métamorphose.
Je suis Justine Bougerol. J’ai été formée à la scénographie, mais j’ai évolué vers une pratique plus large et je suis devenue à la fois plasticienne et scénographe.
Oui, mais dès la sortie de l’école, il y a plus de quinze ans, j’ai bifurqué et me suis investie simultanément dans la création d’installations et de scénographies.
Principalement pour la compagnie belge Peeping Tom. J’ai également collaboré avec d’autres artistes en Belgique, notamment Silvio Palomo.
Oui, tout à fait.
Absolument. Que ce soit en scénographie ou dans mes installations, j’envisage l’espace comme un personnage principal. Au théâtre, l’espace met en valeur les comédiens ou danseurs. Ici, en étant à l’initiative de la création, je veux faire de l’espace lui-même un protagoniste.
On découvre une montagne blanche, qui semble émerger du mur, en faisant corps avec lui tout en s’en détachant pour inviter le regard du spectateur à s’approcher. Une sphère lumineuse attire l’œil, placée au cœur de cette structure.
L’installation crée un effet de fusion avec le mur, comme si la montagne surgissait de celui-ci. Lorsqu’on se rapproche, une brèche devient visible, incitant le spectateur à plonger son regard à l’intérieur. Dans mes installations, je place souvent le visiteur face à l’œuvre, immobile, tandis que son regard seul peut voyager vers un ailleurs, souvent teinté d’une dimension funeste.
Oui, c’est une première. Jusqu’à présent, mes créations étaient marquées par l’obscurité, l’opacité, une matière plus dense. Ici, j’ai souhaité explorer la lumière.
Oui, j’ai réellement pensé cette installation en fonction du lieu. L’opportunité de travailler in situ m’a permis d’imaginer une pièce en dialogue direct avec l’espace d’exposition.
J’ai été invitée à participer à l’exposition et nous avons échangé sur les thèmes abordés. La notion de chaos, notamment, résonnait particulièrement en moi. J’ai ensuite visité l’espace et pensé une installation adaptée, en collaboration avec la scénographe qui m’a proposé un agencement qui me convenait parfaitement.
Oui, notamment parce que les broderies, qui représentent la Terre, la Lune et le Soleil, établissent une correspondance avec la sphère que je mets en scène. De plus, les bulles de savon situées derrière la montagne, par leur rondeur et leur aspect iridescent, entrent en résonance avec ma propre recherche sur la lumière et la couleur. Bien que mon travail ici soit dominé par le blanc, la couleur s’y infiltre de manière subtile, presque imperceptible, apportant un souffle vital.
Je suis très heureuse d’y participer. L’exposition est remarquablement bien conçue et très inspirante. Ayant travaillé in situ, j’ai pu nourrir ma création des échanges et des dynamiques du lieu.
Chaosmos au Maif Social Club, jusqu’au 26 juillet 2025
Entrée libre.
Visuel :© Jean-Louis Carli