Pour le Festival du Livre 2025, au Grand Palais, le « Cabaret Extra ! » de Romain Brau surgit de la Galerie 2 du Grand Palais, qui se transforme pendant trois jours en une scène de cabaret flamboyante, dans un clin d’œil aux cabaret littéraires et au salons littéraires des XIXe et XXe siècles.
Par Yaël Hirsch & Laura Dumez
RB : La cigale et la fourmi. Cela a été une inspiration pour les costumes.
RB : Alors, toute la direction artistique du Cabaret Extra ! a été puisée à travers le texte, les mots, la littérature en général, et étant donné qu’elle est si vaste et si élastique, on s’est bien amusés avec. Il a fallu faire une très belle inspiration pour trouver le point de départ pour nos costumes, et tout de suite les fables de la fontaine, le côté chimérique de l’animal nous a beaucoup parlé. Surtout aujourd’hui, quand tout se redessine, tout se retransforme, et tout n’est que bataille et combat, on a eu envie d’avoir un message très fabuleux, pour ne pas dire fabuleux. En particulier pour avoir ce côté plein d’énergie, plein d’espoir, et créer un renouveau pendant ce festival du livre. Donc les fables de la fontaine ont été un point de départ pour les costumes, et aussi on s’est beaucoup amusés à faire plein de petites connotations, plein de clins d’œil, on parle de courage, on parle de moralité… Je trouve que l’animal et la nature ce sont des choses qui sont très inspirantes pour tout type d’artiste. Donc pour ce surgissement, on s’est vraiment appuyés sur la fable de La Fontaine, puis on est allés plus loin, dans plein d’autres directions.
RB : Chaque artiste invité lors d’un événement pendant le festival arrive avec son attitude, son ADN et son travail. Donc pour le Surgissement c’est le mélange de sept artistes différents que j’ai rassemblés, parce qu’il a des danseurs, des écrivains, des poètes, des gens qui écrivent et de la danse aussi _ c’était très important pour moi d’avoir ce rapport entre la danse et l’écriture. Mais pour la Chansonnière, dont j’ai la chance de faire partie, c’est un seul en scène que j’ai écrit. Après il y a également le tarot littéraire, avec tout un délire entre un écrivain et une diseuse de bonne aventure. Il y a le lip-sync littéraire, le lip-sync c’est des artistes qui font comme on peut le faire dans le milieu du drag queen, du playback, où l’on bouge les lèvres sur une bande son. Pour cela on a fait des interviews d’Amélie Notombe, de Simone de Beauvoir, il y a plein de gens qui sont mis à l’honneur, vu le salon du livre, mais aussi avec des artistes qui ont vraiment joué le jeu, et qui ont écrit un spectacle en référence à la littérature. Cela va jusqu’à la grande dictée inclusive, par exemple : pour faire un clin d’œil à la grande dictée, on a fait la petite dictée inclusive, qui est donc un show burlesque avec une vraie dictée. Il y a plein de performances entre l’art de la scène et la littérature.
RB : C’est politique, le Festival du Livre est politique parce qu’il défend toute sorte de littérature. Cette année on a la chance d’avoir comme pays invité le Maroc, donc c’est aussi un grand sujet pour toutes les personnes qui vont rentrer au Palais, parce que c’est aussi une mise en lumière, une mise en honneur. La littérature francophone elle est pour de nombreux pays donc je pense que c’est très important qu’on puisse parler de toute autre littérature. Il y a aussi le fait d’avoir ce côté queer pour nous dans la direction du cabaret _ je ne pense pas qu’on puisse faire du cabaret sans être queer, en tout cas moi je me l’interdis _ donc je pense qu’on est encore plus motivés aujourd’hui de mettre des minorités dans un spectacle et dans une présentation, surtout dans un événement si grand public, notamment en raison de tout ce qu’il se passe aux États-Unis et dans d’autres pays. Je pense que c’est important que tout le monde soit visible.
RB : Les salons littéraires c’était aussi des moments pour que les femmes puissent se regrouper et puissent faire autre chose que donner des ordres à leurs domestiques, ou être aussi domestiques et juste parler de pensée, de liberté de pensée. Peut-être que la naissance du cabaret c’était déjà ces regroupements littéraires à l’époque. Il y a quelque chose de très beau dans le fait de faire un lien entre les deux. Aujourd’hui le cabaret est un phénomène de mode, parce qu’il faut dire les choses comme elles sont, en tout cas à Paris, les cabarets poussent comme des champignons dans une forêt, et ils sont tous pleins à ras bord, le public est très friand de voir toutes ces méthodes de travail artistiques regroupées dans un seul plateau. Parce que le cabaret c’est la danse, le cirque, la chanson, la performance, et c’est ça qui est intéressant. Donc aujourd’hui le cabaret, pendant le festival, c’est aussi une manière de se dire, tiens on a un cabaret, donc on accueille toute sorte d’art et c’est ça qui est beau.
RB : Le casting ici est fascinant parce qu’on a Cassandre, qui est chorégraphe, danseuse et performeuse, on a Sorhâb qui est chorégraphe, danseur et fleuriste, il a une ferme de fleurs à Bordeaux donc la moitié du temps il fait pousser des fleurs et l’autre moitié du temps il danse et il chorégraphie. Claudius Pong qui est acteur, performeur, écrivain, qui sort son premier grand roman en septembre, et qui lui nous rejoint dans la danse et le mouvement. Il y a Abbey Beach qui est une grande grande féministe qui se bat pour les valeurs de sa communauté : elle est algérienne, kabyle, femme, lesbienne et révolutionnaire, c’est aussi quelqu’un qui sort un livre de 650 pages dans quelques mois. Il y a Lazaro qui est un très grand danseur, mannequin, reliant la mode et la danse contemporaine, et qui fait plein de choses dans l’industrie de la mode et de la beauté. Et enfin, Agathe qui vient de Bruxelles, qui est une grande chorégraphe, danseuse et performeuse. C’est vraiment le plaisir de rallier toutes ces gens qui sont très différents et qui ne sont pas que des danseurs de groupe.
RB : Là on est à la veille du cabaret littéraire et on se rencontre pour la première fois, tous ensemble. C’est pour ça qu’on a deux heures ici aujourd’hui qui sont très précieuses, et après on a une heure sur le lieu avec les costumes, tout est en accéléré. J’ai aussi pris des gens qui sont très indépendants, qui sont très flexibles.
RB : Absolument. On a fait un groupe WhatsApp, on s’est parlé quelques fois dessus, mais tout le monde se rencontre et tout le monde vient nourrir le projet de manière très généreuse.
RB : Il ne faut pas se voiler la face, le pays invité, c’est le Maroc, donc ça me faisait plaisir de prendre une chanson aussi avec un petit côté oriental. On a une grande figure de cette communauté qui est à la ville avec nous, donc c’était aussi une façon de la mettre en l’honneur. Et c’est aussi le plaisir d’être tous ensemble, de rassembler tout le monde sur une belle musique.
RB : Le surgissement, c’est quelque chose qui a été inventé par le festival. Avec le surgissement, on avait envie de casser le salon du livre du festival. On avait envie de surgir dans le festival et pas de rester que dans notre Galerie 2. Le surgissement, c’était le plaisir de surgir dans le festival du livre, de ne pas juste mettre les choses dans des cases. Ah, il y a un cabaret en haut. Pas que de le ranger, même si on est dans une sublime galerie, mais aussi de pouvoir transpirer dans l’organisation du festival. Casser les noms, casser les cases.
Merci beaucoup.
Visuel : ©Stephanie Renoma
Festival du Livre : 11 – 12 – 13 avril 2025 au Grand Palais à Paris.