Depuis la scène, un voix nous murmure : « Oui à l’entre-soi, mais à condition qu’on sache toujours qu’on est plusieurs chez soi ». Le monologue de Delphine Horvilleur incarné par Johanna Nizard reprend sur la scène du Théâtre de la Concorde.
Dans une caverne qui oscille entre Platon, Matrix et les ténèbres du 20e siècle, un personnage mystérieux qui se nomme Abraham Ajar se lance dans un monologue contre toutes les assignations identitaires. Est-il ou est-elle homme ou femme ? S’agit-il d’Émile Ajar ou de Romain Gary ? La manière dont Johanna Nizard s’approprie le texte du rabbin Delphine Horvilleur s’apparente à un sabbat de sorcières ou à un rituel d’exorcisme. Ses transformations nombreuses qui vont parfois jusqu’au grotesque permettent de faire flamboyer dans la pénombre des jeux de mots. L’humour est sur ce plateau l’ultime masque de la tragédie. Il s’agit d’un humour cathartique qui pousse le public à aspirer à un univers bien spécifique : un universel qui ne nie pas la culture, mais qui fustige plutôt son emprise.
Des sermons de la Rabbine au pupitre de sa synagogue jusqu’à la scène du théâtre du monde. Il n’y a qu’un pas franchi avec brio par Johanna Nizard dans ce seul en scène tout à fait singulier. Cela semble un petit pas pour la comédienne, mais c’est un grand pas pour l’humanité. L’humanité, justement, c’est le trait caractéristique de cette pièce déjà nommée aux Molières et qui prend un sens renouvelé, deux ans après sa création, dans un contexte de plus en plus troublé ou l’identité semble prendre toute la place jusqu’à empêcher tout dialogue. Il n’y a donc pas de Ajar à ce que ce monologue habité se retrouve sur la scène du tout nouveau Théâtre de la Concorde, qui propose ce mois de décembre un cycle dédié aux « Identité, exil et diasporas » où vous pourrez voir, la même soirée que Il n’y a pas de Ajar, le seul en scène de Rachid Bouali « On n’a pas eu le temps de se dire au revoir ».
Du 11 au 14 décembre, du 17 au 21 décembre puis du 26 au 28 décembre à 20h30, Les 22 et 24 décembre à 15h.
Visuel : © Pauline Legoff