La clarté, la transparence et la précision seraient les trois mots pour définir Seiji Ozawa. Ce prodige de la direction, enfant croisé de Karajan et Bernstein avec qui il étudia, s’est éteint le 6 février 2024 à Tokyo.
Par Laurent Couson, chef d’orchestre
Directeur musical du festival de Ravinia (1964-68), de l’Orchestre symphonique de Toronto (1965-69) et de l’Orchestre symphonique de San Francisco (1970-76), il se produit également à la tête de nombreux orchestres prestigieux tels que l’Orchestre philharmonique de Berlin, de Vienne, de Londres, l’Orchestre national de France, ou l’Orchestre symphonique de Chicago jusqu’à son dernier poste à l’opéra de Vienne entre 2002 et 2010.
Seiji Ozawa avait un grand amour pour la France et sa façon de diriger la musique française fût saluée à travers le monde. Ce grand musicien japonais avait en effet tout compris de la pudeur et l’innocence de Ravel, de l’humour et l’énergie de Poulenc ou de l’intimité et la spiritualité de Fauré. Il fut aussi l’un des créateurs de nombreux chef d’œuvres de la deuxième moitié du XXe siècle, comme l’opéra saint François d’assise de Messiaen, dont il fût très proche.
Au pupitre c’était un mélange de dragon et de chat, un tempérament de feu doublé d’une douceur extrême que l’on lisait dans ses yeux et son sourire bienveillant. Seiji Ozawa dégageait autant un charisme naturel qu’une gentillesse immédiate, de celle que les musiciens aiment, pour laquelle ils ont envie de tout donner. Il savait saisir chaque détail d’une partition et la rendre lumineuse, évidente, simple, comme si elle avait été écrite la veille en attendant de vivre dans ces mains expertes. Il dirigeait avec ou sans baguette, depuis qu’il l’avait oublié à l’hôtel avant un concert, mais toujours avec une précision et une gestuelle parfaite. Son état de santé eut malheureusement raison de sa grande énergie, et il a malheureusement dû annuler de nombreux concerts ces dernières années pour lutter contre un cancer de l’œsophage.
Nous gardons un souvenir bouleversant de se dernière apparition en public à l’occasion de l’arrivée dans la station spatiale internationale d’un cosmonaute japonais, où il dirigea de son fauteuil roulant, très affaibli et d’une main tremblante mais toujours aussi précise, l’ouverture Egmont de Beethoven. Seiji Ozawa laisse une empreinte indélébile dans l’histoire de la direction d’orchestre, tant il a su, avec modestie et honnêteté se mettre au service des chef d’œuvres qu’il a servi.
Merci Maestro !
visuel : couverture de disque
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